L'empirique et le sensible : Pierre Guerci ou la comédie du trépas

Pour son premier roman Pierre Guerci voit grand et classiquement. Nous sommes dans le pur descriptif d'un roman familial à la française.
Mais l'auteur sait écrire. Il est habile. Son style est fluide et cultive une certaine décontraction de bout aloi pour accompagner la fin de vie d'un père. C'est d'ailleurs une thématique rémanente dans le roman du temps : qu'on pense à L'odeur d'un père de Catherine Weinzaepflen par exemple.

Deux fratries assistent à cette agonie. Tout se passe à travers les yeux du fils cadet, trentenaire, d'une d'entre elles. Celui-ci jusqu'au bout est en quête de reconnaissance vis à vis d'un vieillard qui a d'autres soucis que cette éruption qu'il peut juger à juste titre intempestive.
Les silences du mourant restent abyssaux, au moment où les rivalités familiales resurgissent et explosent. Et Guerci évoque ce temps d'acmé et d'extinction. Celui d'un présent tragique habité néanmoins des bons jours du passé.Tout se passe dans un silence feutré et à fleuret moucheté lorsque les regards sur le vieil homme malade et sur la mort elle-même donnent une dimension paradoxale à ce qui se passe. 

S'entrecroisent une lente agonie et l'urgence de vivre de tous ceux qui restent. Et tout se dit dans le grand écart que font les mots et les silences pour sauver les nuances d'un temps augustinien dont l'auteur marque la cadence dans sa faculté de description et d'évocation.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

 

Pierre Guerci,  Ici-bas, Gallimard, janvier 2021, 208 p.-, 18 €
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