Louise Glück : l'intime et le général

Louise Glück est une des voix majeures de la poésie contemporaine américaine. À partir de son expérience intime, l'auteure traverse  le féminin. Sa propre biographie s'estompe néanmoins dans son œuvre. N'y reste que des traces là où le langage les transforme en profondeur et en interrogations.
La créatrice questionne sa propre finitude, notamment par un regard distancié sur la vie quotidienne en une forme de métaphysique dans une "poétique de la renaissance" depuis la parution de son premier recueil en 1968.

Dans Nuit de foi et de vertu, paru aux États-Unis en 2014 et récompensé par le National Book Award for Poetry – en un mélange de retenue et d’affirmation – le lyrisme dépasse largement l'expérience personnelle. L'auteure vise l’universalité en utilisant les ressources narratives pour les transformer en poésie propre à traquer le mystère du commencement et de la fin d’une histoire, qui peuvent être aussi ceux d’une vie.

Le livre est constitué de fragments de récits d'impressions fugaces et détails en écho. Le "je" qui narre un souvenir peut appartenir à une femme dans un poème, puis d’un homme dans celui qui suit.
Nul ne peut affirmer si nous sommes toujours dans la réalité ou déjà dans le rêve. Demeure une forme d’épopée intime propre à l'onirisme puisque des associations libres font dévisser la trajectoire linéaire.

Se confronte une extrême simplicité à de larges visions proches néanmoins de la confession. Louise Glück met à nu l'énigme de l'être là où les vagues sont freinées par des coupes abruptes et des ellipses.
Ce livre à ce titre recèle une grande originalité et marque une nouvelle étape dans l'évolution de la poétesse américaine.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

 

Louise Glück, Nuit de foi et de vertu, traduit de l'anglais (États-Unis) par Romain Benini, édition bilingue, coll. Du monde entier, Gallimard, mars 2021, 226 p.-, 17 €
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