Daniel Kay : déclinaisons des fantômes

Le genre du "Tombeau" est bien connu des poètes. DanieL Kay l'a déjà utilisé à propos d'un autre écrivain breton : Georges Perros. En 2019, il a fait paraître, pas loin de cet exercice littéraire, Vies silencieuses, poèmes en vers et en prose, constitués comme une invitation, au travers des siècles et des lieux de la peinture, à entrer dans le secret des couleurs.

D'une certaine façon  Tombeau de Jorge Luis Borgès en constitue une suite mais les peintres sont remplacés par les poètes. De Borgès, Kay analyse ses thèmes et son imaginaire (le tigre, la rose, la théologie, le bandonéon, la bibliothèque, etc.). Mais à travers le miroir de ses mots il évoque aussi Victor Segalen (forcément - tant données ses propres "stèles"), Georges Perros, Armand Robin, et une série de menhirs pour rendre hommage au poète argentin.

Le chant prend des tonalités particulières et tourmentées propres aux deux  genres poétiques choisis.  Ils ne sont pas fait pour soigner. Ce qui n’empêche pas au discours poétique de se poursuivre. Entre autres à  travers l'auteur argentin qui au nom de la poésie et de l'amour  inventa un nouveau cours à la littérature.

Kay recherche le sens d'une telle oeuvre qui ne cessa de s’échapper parce que son auteur la laissa fuir. D’où, et en écho, des textes où la voix enfle puis se coupe. Hors du récit, du témoignage ou de la simple confidence. Loin des formes traditionnelles l’écriture est toute en intensité fondée sur diverses fractures. 

L'auteur veut se sentir proche de celui qui par la nuit connut la lumière. Sortant de sa tombe Borgès semble naviguer sans boussole, en dérive. Tout demeure énigmatique. car Da,iel Kay ouvre un angle à partir duquel se dessine les contours d'un silence rappelant que chaque jour - même dans le noir - tout reste à voir.


Jean-Paul Gavard-Perret


Daniel Kay, Tombeau de Jorge Luis Borgès suivi d'Autres stèles, coll. Blanche, Gallimard, juin, 2021, 126 p., 14 €

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