La traversée du temps selon Delphine Arbo Pariente

L'héroïne de ce roman permet de suivre la remontée de son passé douloureux. Et ce par l'effet  d'une passion amoureuse qui ne possède pas tous les effets attendus et escomptés : J’ai cru que l’événement de ces dernières semaines, c’était ma rencontre avec Vincent, mais sur ce chemin qui me menait à lui, j’ai retrouvé la mémoire. Et en ouvrant la trappe où j’avais jeté mes souvenirs, la petite est revenue, elle attendait, l’oreille collée à la porte de mon existence.
Ce roman est bien plus fort que les élégies à la Christine Angot.  Même si comme chez elle dans le roman de Delphine Arbo Pariente, le passé fait de violence, à l’ombre d’une mère à la dérive et d’un père tyrannique, qui l’initiait au vol à l’étalage comme au mensonge.

Plutôt que de se vautrer dans ce qui la terrassait l'auteur lutte contre le silence, l’oubli et la volonté et le besoin d'en sortir. Une langue précise et ample donne une puissance particulière non seulement au scénario de vie mais aussi à une mémoire familiale sur trois générations. De la Tunisie des années 1960 au Paris d’aujourd’hui.

Une telle fiction mélange l’irrémédiable et la perte à la puissance du désir et de l’écriture. Celle-ci sort de l’évidence trop simpliste. L'auteure sait en effet que l'épreuve romanesque doit créer certains évidements pour éviter des évitements. C'est en ce sens que l'écriture porte en elle la faculté d’attester du réel et d'un "ça a été" (Barthes) et ses manques qu'il faut subsumer pour recouvrer une identité.
 

Jean-Paul Gavard-Perret

Delphine Arbo Pariente, Une nuit après nous, Gallimard, aout 2021, 256 p.-, 19 €
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