Jean-Pierre Siméon poète déterminant

Afin que la poésie veuille mal de mort à la froideur du concept et à l’esprit de système, Siméon  propose ce qui peut sembler un paradoxe puisqu'il parle de théorie. Mais pas n'importe laquelle. Son ambition n'a pas pour but d'imposer un logos mais l'amour.

Cela peut paraître naïf et semble contrevenir au bon sens. Je tiens cependant que c’est trop rapidement en juger, précise Siméon. En effet, tout ce que le monde dit via ses divers canaux de médiatisations est  otage des machinologues en tout genre, s’asservit pour notre malheur à la souveraineté d’une abstraction qui s’épargne les démentis du réel.
Face à cet état de fait Siméon ose de genre qui tombe en désuétude : la poésie. 

Siméon croit encore à elle et il prouve en en écrivant au nom d'une vérité pour lui première, à savoir la compréhension des choses non surplombante mais impliquée, sensuelle assurément, qui a aussi pour moyen la main et le pied. Et cela pour une raison majeure. Pour Siméon,  la pensée dans le poème a du corps enfin, et c’est le corps du monde, et c’est le corps de chacun. Chaque poète est donc un dispensateur de  souffle vivant qui croise la pulsation du cœur à l'encolure du vent.

Face aux formes de domination la poésie devient une forme de résistance construite par le rythme et le son qui agencent à travers l'écriture ce que produit ailleurs un sens aussi anonyme  que commun. Bref contre cette matière noire la poésie reste un cristal pur dont il est vrai on tarde à reconnaître les effets mais elle permet de repenser la vie dans la marche des sentiments vers pour une vraie présence.
 

Jean-Paul Gavard-Perret

Jean-Pierre Siméon, Une théorie de l’amour, Gallimard, 2 novembre 2021, 124 p.-, 12 €

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