Brina Svit et les indices

L'écriture de Brina Svit suggère qu'il n'y a pas d'amour heureux. Les mots retenus sont donc appropriés à la thématique d’ensemble, assujettis au rythme marqués au sceau de la domination de la solitude. L’auteure montre ainsi combien l'absence n’est pas ce qu’en disait Beckett – à savoir le meilleur des biens mais son contraire. Et ce lorsque par exemple la seule rencontre au cœur d’une journée est celle d’une employée de supérette derrière sa caisse.

Les nouvelles actionnent  des isolements affectifs que les narrations rendent communicables. Selon  la créatrice l'enfermement n’a rien d’une nécessité qui doit être défendue, elle est même sans justification ce qui la rend plus âpre. Personne ne peut s’y retrouver sauf à être des ascètes ou une Maria Zambrano.

La romancière prouve que la solitude non choisie appartient à ses sentiments existentiels que nous assumons mal au moment où elle envahit. Elle reste un piège imposé par les circonstances (limogeage, décès, etc.). Et la parole de Svit ne prétend pas  en libérer. Elle souligne la pression excessive qui désagrège.

Les nouvelles deviennent les temps de cette déroute, intime, humaine, trop humaine. La victoire ne peut se  remporter sur la solitude.  Mais la créatrice ne tombe jamais dans le pathos. L’humour discret est là pour montrer ce qui taraude du centre de notre être et la totalité des instants donc et progressivement la vie entière.

L’amour est donc, en son après, un désastre. Il n’existe même plus l’humiliation de l’adversaire - amant ou amante. La solitude est là : c’est une chose qui sape. Plus question de jeter l’interdit sur sa nécessité.  Si bien qu’écrire comme le fait l’auteure est ni plus ni moins que le contraire de parler au moment où le silence est devenu permanent.

Jean Paul Gavard-Perret

Brina Svit, Nouvelles définitions de l'amour, Gallimard, février 2017, 256 p.-, 19,50 €
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