Monica Ojeda "image" les passions des femmes

Dans Mâchoires tout commence par un kidnapping entre deux femmes (une professeur séquestre son élève). Et ce premier moment illustre un monde de relations frénétiques et ambigües. Violence, terreur et amour suintent dans un univers où la force fait loi : il s'agit de faire mal à l'autre, ou de se faire mal.
Cet enfermement premier prend racine dans un autre lieu clos : un lycée de privilégiées qui déplace le monde urbain vers une nature pas forcément bienveillante. Et la partie animale des êtres s'imposent.
Les adolescentes y apprennent à devenir parfaites mais elles trouvent des échappatoires et expérimentent diverses limites et espace où le corps et la sexualité sont omniprésentes.
Surgit alors, très sensuellement, l'étrange désir de manger l'autre, de le posséder, de le chosifier : c'est là que les filles font l'expérience de leurs mâchoires.
La romancière équatorienne image donc de manière originale le désir, l'obsession, la passion là où à l'imaginaire de l'auteur semble répondre à celui de ses personnages.
Jean-Paul Gavard-Perret
Monica Ojeda, Mâchoires, traduit de l'espagnol (Équateur) par Alba-Marina Escalón, coll. Du monde entier, Gallimard, 2022, 320 p.-, 19€
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