Les compagnonnages de Gérard Macé

Si – comme l'auteur l'écrit en début de son ouvrage : Tout le monde pense, les poètes aussi. Ceux-ci ne pensent pas n'importe quoi et l'importe comment. Et ils sont avant tout linguistes à leur façon : Ils ne possèdent pas une langue, ils sont possédés par elle.

Quittant le monde des théoriciens qui – comme Jean Paulhan avec La preuve par l’étymologie ou Rémy de Gourmont et l’Esthétique de la langue française – ont donné un récit d'apprentissage du langage poétique.

Sortant des textes les plus connus des auteurs retenus de Baudelaire à Réda en passant – entre autres – par Cros, Segalen, Jarry, Artaud, Queneau, Michaux - Gérard Macé montre ce qu'il en est de la "pensée" des inventeurs de langues imaginaires, ou d’un vocabulaire fantastique.
Pour les "comprendre" l'auteur a choisi de laisser de côté la poésie "pure" de tels créateurs pour faire jaillir   leur rapport affectif et musical aux mots, à la phrase. Loin des acrobaties liées à ce qui ferait preuve d'un simple petit talent, de tels créateurs se fonts pédagogues remarquables. Ils prouvent non seulement comment ils "pensent" mais comment ils apprennent à  analyser ce qu'ils créent.

Et cela est fort habile. Macé sait que le poème dans ses diverses modalités échappe à l’ordre du discours et de la pensée. C’est pour de tels créateurs une question "d’accent". Mais, ici – se rapprochant du logos – ils permettent de saisir ce qu'ils créent là où souvent c'est après coup qu'ils découvrirent ce qu'ils avaient à dire.


Jean-Paul Gavard-Perret


Gérard Macé, La pensée des poètes  Anthologie, coll. Inédit Essais, Folio, mai 2021, 386 p.-, 8,60 euros

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