Wraithborn, tome 1 – Renaissance

En 1998, sous l’impulsion de Jim Lee, l’éditeur DC Comics récupère Wildstorm, un label d’Image Comics, et étoffe donc son catalogue de personnages. Les super-héros Wildstorm ne vont pas intégrer tout de suite l’univers officiel DC Comics : il faudra attendre 2011 et le New 52. Entre-temps, en 2004, DC Comics lance Wildstorm Signature, une filiale qui va rééditer un certain nombre d’anciennes séries Wildstorm, et produire quelques séries originales, comme Wraithborn. Ne rencontrant pas le succès escompté, DC Comics stoppe le titre de Joe Benitez au bout de six épisodes. Mais l’histoire ne s’arrête pas là : Joe Benitez s’en va créer sa propre maison d’édition (Benitez Productions) et rachète les droits de sa série. Il remanie légèrement son travail en vue de le rééditer début 2016. C’est cette version révisée (Redux) que Glénat propose aujourd’hui en France.

De son propre aveu, Joe Benitez n’a pas conçu Wraithborn tout seul. Si on lui doit l’idée générale de l’intrigue, c’est Marcia Chen qui a écrit l’histoire et les dialogues des premiers épisodes avant de laisser progressivement Joe Benitez s’occuper d’une large partie du travail. Cette inexpérience explique peut-être pourquoi l’intrigue de Wraithborn est à ce point ordinaire. Car, grosso modo, on retrouve ici un pitch qui rappelle de loin celui de Buffy contre les vampires. Seulement Benitez et Chen se montrent beaucoup moins efficaces, la faute à une histoire qui avance beaucoup trop lentement et qui manque vraiment de rythme. Et d’enjeu, serais-je tenté d’écrire, puisque dès les premières pages, un flash forward nous informe que Mélanie va survivre aux événements, si tant est qu’on puisse ait pu avoir un doute. Ajoutons à cela que la série n’a pas de suite, Benitez n’ayant jamais dessiné l’épisode sept. Donc en gros, Wraithborn est une origin story. Point.
Dommage, parce Joe Benitez et Marcia Chen avaient eu une bonne idée : se réapproprier le folklore vaudou en situant l’histoire en Lousiane, une région qu’on n’a pas l’habitude de parcourir dans les comic books. Seulement voilà, la bonne idée, Benitez et Chen l’oublient en cours de route, et l’exotisme se limite très vite à quelques noms de créatures.

Le style graphique de Joe Benitez m’a posé un problème à la lecture de Wraithborn. D’abord, son trait n’évolue pas : il dessine toujours de la même façon depuis ses débuts chez Top Cow (Weapon Zero, The Darkness, The Magdalena). Déjà il faisait une synthèse entre le style des dessinateurs de la firme et celui de Todd McFarlane. Comprendre : toutes les filles sont dessinées à faire pâlir les danseuses du Crazy Horse. Toutes. Et tous les hommes sont des athlètes olympiques en puissance. On repassera pour la variété et la crédibilité. Non, la grande force de Joe Benitez, c’est le soin qu’il apporte à ses designs. Seulement cette attention est très inégale : autant il va fignoler une armure, autant il va bâcler ses fonds, ses proportions ou sa narration, par exemple. Lady Mechanika et son univers coloré steampunk s’accommodait plutôt bien à son trait et ses envies de design précieux. Dans Wraithborn et son univers contemporain, c’est déjà beaucoup moins agréable à lire.
Résumons : une intrigue faiblarde et des dessins pas très réussis. Wraithborn a quand même un atout, celui d’être une charmante et gentille résurgence d’un style de comic books qui faisait fureur dans les années 90. Wraithborn s’adresse probablement à ce public nostalgique de la grande époque Wildstorm et Cliffhanger où l’histoire comptait sûrement beaucoup moins que la cambrure des héroïnes.
Stéphane Le Troëdec
Joe Benitez, Marcia Chen (scénario), Joe Benitez (dessin)
Wraithborn, tome 1 – Renaissance
Édité en France par Glénat (1er février 2017)
Collection Comics
176 pages couleurs, papier glacé, couverture cartonnée
15,95 euros
ISBN : 9782723494328
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