Justice League of America, tome 1 – Le Nouvel Ordre mondial

Au milieu des années 90, les ventes des séries liées à la JLA (Justice League International et les spin-offs Justice League Europe, Extreme Justice, and Justice League Task Force) sont relativement faibles. Du moins, elles ne correspondent pas aux attentes de DC Comics sur un titre aussi prestigieux. L’éditeur choisit alors de supprimer toutes ces séries pour revoir son approche du groupe. Après le run de Giffen et DeMatteis, le but affiché est de revenir à une série plus sérieuse et de réintégrer dans le groupe des super-héros plus connus et  plus historiques.

 

Ce travail de reconstruction s’effectue en deux temps. Première étape : Justice League: A Midsummer's Nightmare, une mini-série de 1996 en trois épisodes scénarisés par Mark Waid et Fabian Nicieza et illustrés par Jeff Johnson et Darick Robertson. L’objectif de cette saga est clairement de retrouver une composition classique : à la trinité chère à DC (Batman, Superman, Wonder Woman) viennent s’ajouter Flash, Green Lantern, et le Limier Martien. Mark Waid et Fabian Nicieza imaginent une première partie plutôt réjouissante : les super-héros se réveillent dans un monde où ils n’ont plus de superpouvoirs. Ils ne se souviennent même plus qui ils sont ! Certains humains se découvrent des pouvoirs et leur nombre se multiplie exponentiellement. Cette situation très particulière va attirer l’attention de Bruce Wayne et Clark Kent qui vont progressivement retrouver la mémoire. A Midsummer's Nightmare bénéficie d’un très bon démarrage, l’univers imaginé par les scénaristes étant plutôt intéressant. La seconde partie de l’histoire est par contre un peu plus classique et stéréotypée. En fin de compte, l’histoire se termine sur une JLA « historique » recomposée. Ne reste plus qu’à lui faire vivre de nouvelles aventures…

 

C’est 1997 que DC Comics a eu l’excellente idée d’aller chercher le scénariste Grant Morrison. À cette époque, l’artiste n’est pas aussi connu que maintenant. Il vient d’écrire quelques titres pour Vertigo (Sebastian O, Mystery Play, Kill Your Boyfriend ou bien encore Flex Mentallo) quand DC Comics lui propose de réinventer la JLA. Grant Morrison en réalité bien plus que cela.

 

Tout d’abord, il profite de la composition dite classique de l’équipe pour rendre un hommage discret à la richesse de l’univers DC. Il serait trop facile de ne voir en Morrison qu’un scénariste iconoclaste ; je vous invite à relire son chef d’œuvre et tout à la fois déclaration d’amour à l’Âge d’or qu’est All-Star Superman. Certaines intrigues et personnages de sa version de la JLA sont en effet des hommages et des références à tout un pan de l’histoire de l’équipe.

 

Son travail de réinvention va consister à positionner les adversaires de l’équipe à un niveau différent. Superman et ses amis se concentrent maintenant sur des menaces bien plus dangereuses et impressionnantes : invasion d’extra-terrestres surpuissants et antédiluviens venus coloniser notre planète, anges renégats, etc. Bigger and louder. Cette sensation de puissance est renforcée par le dessin d’Howard Porter. Cette vision du groupe préfigure ce que sera plus tard des séries comme Stormwatch ou The Authority.

 

Urban Comics a choisi de réunir dans ce premier volume A Midsummer's Nightmare et les premières sagas de Grant Morrison. C’est a priori une excellente idée. Sauf qu’à la lecture, on se rend compte qu’il y a quelques similitudes entre les intrigues du duo Waid/Nicieza et certaines histoires de Morrison. Du coup, on peut avoir l’impression de redite voire de monotonie. Mon conseil : lisez les épisodes de A Midsummer's Nightmare, puis faites une petite pause avant d’attaquer ceux de Morrison.

 

Les premiers pas de Grant Morrison sur JLA sont extrêmement importants : son approche novatrice à cette époque va non seulement propulser la série en tête des ventes, mais aussi inspirer d’autres scénaristes. Si vous cherchez les ancêtres des Ultimates ou de The Authority, vous les trouverez dans cet album. Vingt ans après, ces épisodes de Morrison n’ont pas vieillis et ont conservé leur force évocatrice.

 

 

Stéphane Le Troëdec

 

 

 

Grant Morrison, Mark Waid, Fabian Nicieza (scénario), Howard Potter, Jeff Johnson, Darick Robertson (dessin)

Justice League of America, tome 1 – Le Nouvel Ordre mondial

Édité en France par Urban Comics (20 janvier 2017)

Traduit par Jeremy Manesse

Collection DC Classiques

344 pages couleurs, papier glacé, couverture cartonnée

28,00 euros

ISBN : 9791026810889

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