Lazarus, tome 2 : Ascension

Le Futur. Le monde est revenu à un système social quasi-féodal où des domaines sont dirigés par des Familles. Si vous n'êtes pas membre de la famille, ou bien un de leurs Serfs, vous n'êtes rien, c'est-à-dire un « déchet ». Forever est une des filles de la puissante famille Carlyle, entraînée depuis son enfance à protéger la Famille et son domaine contre toute attaque.

Dans ce tome 2, Forever vient en aide à sa sœur, Johanna, pour démanteler un réseau terroriste à Los Angeles. Au même moment, les Barret, une famille d'agriculteurs, sont contraintsde quitter leurs terres après une inondation dévastatrice. Leur seul espoir ? Être remarqués au cours de « la Montée », grâce à laquelle un des frères Carlyle sélectionne de nouveaux serfs…


Le premier tome de Lazarus m'avait vraiment impressionné, et parmi les trois titres de la nouvelle collection Glénat Comics en avril dernier, c'était celui qui à mes yeux avait le plus de potentiel.


Ce deuxième tome se devait donc d'enfoncer le clou. Greg Rucka choisit dans ces nouveaux épisodes de travailler un peu plus le fond. Car le premier tome focalisait beaucoup sur Forever et la famille Carlyle, sans vraiment approfondir le reste de l'univers.


Rien d'étonnant donc par exemple à ce que Rucka choisisse de nous montrer un peu plus comment on « fabrique » un lazare. Quelques flashbacks dispensés en début de chaque épisode explorent le passé d'une Forever encore enfant et entraînée « à la dur » par une tutrice. Cela permet de mieux comprendre le processus, qui était resté dans le flou jusqu'ici. S'il y a, en fin de compte peu de suspens, pour cette partie de l'intrigue (on sait bien que Forever va survivre à son conditionnement et son entraînement), c'est surtout un moyen pour Rucka de poser l'ambiance, et de souligner l'inhumanité de ces familles prêtes à tout pour conserver le pouvoir, quitte à sacrifier l'innocence d'une gamine. J'ai d'ailleurs bien aimé la pirouette qui clôt (temporairement) cette histoire.


La fin du tome un laissait entendre une suite peut-être un peu plus explosive, puisque la Forever adulte possédait une information qui aurait bien pu changer la donne très rapidement  (« Les Carlyle ne sont pas ta famille »). Sauf que Greg Rucka choisit d'explorer doucement cette voie. Quand Forever choisit de venir en aide à sa sœur, Johanna, on ignore encore s'il s'agit pour elle de continuer à jouer la comédie, pour en découvrir un peu plus, ou bien si c'est parce qu'elle ne peut se résoudre à l'inacceptable. Comme Rucka n'utilise pas de « voix off » pour clarifier les pensées de son héroïne, le doute est permis. Et c'est plutôt bien vu de sa part, car, du coup, Lazarus gagne encore un peu plus en profondeur.


La grande nouveauté dans ce tome 2, c'est l'apparition d'une nouvelle famille, les Barret, qui ont donc choisi de tenter le tout pour le tout. Greg Rucka s'offre ici un contre-champ particulièrement intéressant : dans le tome un, toute l'histoire se focalisait sur Forever et ses rapports « familiaux », si tant est qu'on puisse encore les appeler ainsi ! On redécouvre l'univers de Lazarus à travers d'autres personnages, nés dans le mauvais camp, celui des inutiles, des pauvres, des « déchets ». Le contraste est saisissant : les Barret forment une famille unie, et pleine d'une humanité et de valeurs qu'on croyait disparues. Leur trajectoire permet à Rucka de dépeindre un peu plus l'environnement, à travers plein de petits détails. Et donc là aussi, l'histoire gagne en richesse. « Je regardais le combat des Indignés au moment où l'idée de Lazarus m'est venue », explique Greg Rucka. Lazarus, allégorie de notre société ? « La richesse continue de s'accumuler chez les riches et de ne pas être redistribuée vers ceux qui en ont le plus besoin ».


Parce que Rucka ne noie pas son intrigue avec de longs dialogues, Michael Lark a de la place pour exprimer son talent et travailler sa narration. Il y a de beaux moments sans texte, qui permettent de travailler les regards, les moments de flottement ou de doutes. Lark utilise beaucoup un format de case proche du cinémascope, élégant, qui souligne la distance entre les personnages.


Évidemment, si vous attendiez de ce tome 2 qu'il soit explosif, vous serez probablement déçu. Au contraire, Rucka prend son temps pour peindre un univers qui rappelle évidemment le notre et pour écrire une histoire plus introspective. Voilà donc un nouveau volet qui, sans oublier les qualités du premier tome, enrichit considérablement le fond de l'histoire, en développant de nouveaux personnages. Nul doute que la rencontre entre Forever et les Barret va être intéressante…

Si vous en doutiez encore, Lazarus est un excellent comic book de science-fiction. On annonce déjà une adaptation en série tv. Mais d'ici là, le tome 3 sort en novembre prochain. L'attente sera longue, très longue…



Stéphane Le Troëdec




Greg Rucka (scénario) et Michael Lark (dessins)

Lazarus, tome 2 : Ascension

Cet album compile les épisodes Lazarus #05 à #09, publiés aux USA par Image Comics.

Édité en France par Glénat Comics (26 août 2015)

Traduit de l'anglais (USA) par Alex Nikolavitch

128pages

14,95 euros

ISBN : 9782344009253

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