Henri Raczymow, "Elle chantait Ramona"

Continuant l'exploration de ses histoires personnelles en leur donnant une portée supérieure à la simple chronique familiale,  toute délicieuse soit-elle, pour évoquer le sort des survivants de la communauté juive installée à Belleville, Henri Raczymow donne avec Elle chantait Ramona la voix à ses parents et au "petit" peuple gouailleur et débrouillard, immensément pauvre et généreux, viscéralement attaché à la France, sa langue, sa culture et son histoire, malgré l'épisode du régime de Vichy.

Dans l'immédiat après-guerre, deux survivants vont s'aimer, et réapprendre à être eux-mêmes, non plus une réfugiée dans son propre pays, non plus un hors-la-loi pour son propre état. Deux parcours, deux manières d'avoir résisté, et un voyage de noce en Normandie pour tout se dire et apprendre à s'aimer.

On retrouve le Belleville d'Avant le déluge (2005), dont Elle chantait Ramona pourrait constituer une suite. L'univers des fripiers, de la communauté juive parisienne loin des ors des Rothschild. Cette communauté de survivants qui vivent un peu au rythme du Parti communiste et des traditions yiddish, entre communautarisme pacifique et ouverture précautionneux des amitiés aux français qui furent la veille encore ceux par qui le malheur pouvait arriver. 

Un roman hommage, comme souvent sous la plume d'Henry Raczymow, qui construit par touches éparses une œuvre testimoniale d'une rare émotion.



Loïc Di Stefano

Henri Raczymow, Elle chantait Ramona, Gallimard, février 2017, 144 pages, 14,50 eur
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