Les origines d’une consécration universitaire

Les éditions Fayard ont pour habitude de publier les leçons inaugurales du collège de France et nous offrent ainsi l’occasion de revenir sur la carrière de Patrick Boucheron. Ancien étudiant de George Duby, il a soutenu un doctorat au titre évocateur, le pouvoir de bâtir : urbanisme et politique édilitaire à Milan aux XVe et XVIe siècles. Patrick Boucheron s’est très vite affirmé comme un spécialiste des villes italiennes et des phénomènes de pouvoir qui y sont liées. Dans le même temps, Boucheron s’est également intéressé à l’écriture de l’Histoire aujourd’hui. Sa leçon porte ainsi les traces de cette double spécialisation.

La grande question

Au cœur de la leçon de Boucheron se trouve cette interrogation fondamentale : « que peut l’histoire aujourd’hui ? », surtout dans ces moments douloureux que nous avons vécu durant les attentats de 2015. Patrick Boucheron invite à revenir sur le moyen âge et la renaissance, notions mouvantes et finalement peu historiques, relevant aussi de la création historiographique. Puis il invite à s’intéresser à une histoire des pouvoirs, remontant à la réforme grégorienne et à la nouvelle doctrine sacramentelle qu’elle a imposé à l’Occident : Boucheron y voit une idéologie de la séparation entre chrétiens et infidèles, hérétiques, juifs. On sent qu’il tisse un parallèle, sans le dire bien sûr, avec la situation d’aujourd’hui. L’histoire se mêle là de politique mais n’est-elle pas aussi pure politique ? Cette leçon est à lire, même si on la juge partiale, tant sa richesse de vues submerge l’intellect.

Sylvain Bonnet

Patrick Boucheron, Ce que peut l’histoire, Fayard, mai 2016, 72 pages, 12 €