Guerre mondiale guerre totale
Evidemment, un(e) féru(e) d’histoire ne s’aventurera pas dans cette lecture. Gallimard s’adresse manifestement ici à un lectorat jeune ou qui aimerait simplement disposer d’une mini-encyclopédie sur le sujet. Et de ce point de vue, l’objectif est parfaitement atteint.
Comme dans un petit Découverte Gallimard, les évènements sont expliqués simplement mais suivant une structure thématique solide et appuyés par une multitude de documents, qui peut paraître brouillonne mais aussi évocatrice et ayant l’avantage de fixer les notions et évènements dans les esprits. L’échec de la stratégie d’apaisement, la guerre européenne puis la guerre mondiale, les occupations, violences de masse et camps, les différentes réactions des sociétés civiles, les batailles de libération et reconquêtes… tout y est, illustré par cartes géopolitiques, affiches d’époques, photographies des grands hommes comme des petites héros et des victimes inconnues, ainsi que par des petits encadrés expliquant certains concepts.
Car pour le lectorat auquel s’adresse cet ouvrage il faut clarifier certains points, comme le fait, par exemple, que ce conflit est une guerre TOTALE : « les opérations s’étendent à la totalité des espace. Tout est subordonné à la conduite de la guerre et aux objectifs de la guerre : la société entière est impliquée dans le conflit, la vie privée n’a plus d’autonomie. Le camp adverse, diabolisé, sans différenciation, n’est plus qu’un ensemble de cibles à détruire. La guerre totale ne peut donner lieu qu’à une victoire totale, à un écrasement de l’ennemi par une reddition sans conditions. Elle écarte par principe les solutions de compromis.».
Les auteurs de ce livre hautement didactique n’oublient jamais qu’ils parlent de guerre « totale ». C’est pourquoi toutes les régions du monde sont évoquées, à plusieurs reprises – même si, bien sûr, l’essentiel reste occidentalo-centré. L’avantage d’englober toutes les nations dans ce concept de guerre totale est que, même si l’Allemagne reste l’instigatrice principale de cet inédit chaos, les peuples sont plus ou moins tous mis sur un pied d’égalité dans l’escalade de la violence et de l’horreur. L’inconvénient étant que cela n’implique pas, ou trop peu, que les différentes nations aient eu un cheminement spécifique dans cette guerre (entraînées, impuissantes, provocatrices par nécessité ou dérive idéologique). Pourquoi le nazisme est arrivé en Allemagne et comment Hitler a-t-il réussi à faire d’un pays détruit un reich impérialiste et surpuissant en quelques années? Quelles sont les particularités de l’Italie fasciste ? Quels sont les tenants et aboutissants du pacte germano-soviétique ? Quelle logique sous-tendait la guerre du côté japonais, l’allié de l’Axe qui n’a jamais attaqué les Russes pour soulager l’Allemagne ? Ces quelques questions laissent imaginer tous les aspects qui ne sont que vaguement esquissés.
Guerre Mondiale Guerre Totale tend plus à expliquer ce qui s’est passé que pourquoi cela s’est passé. Et on ne saurait s’en étonner car tenter une véritable illustration synthétique de la faillite de la paix dans les années 1930, des systèmes totalitaires, de l’apparition du racisme poussé à l’extrême, des systèmes d’alliances et de retournement d’alliances… ne peut se faire que de cette manière ou en réalisant un ouvrage beaucoup plus épais et moins grand public. Néanmoins, Guerre Mondiale Guerre Totale constituerait l’idéal remplaçant des chapitres sur le sujet, généralement faibles, des manuels scolaires à destination des futurs bacheliers.
Matthieu Buge
Guerre mondiale guerre totale, Gallimard « Découvertes » / Mémorial de Caen, juin 2010, 26 €
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