"La bataille de Normandie", A l'Ouest rien de nouveau

Commémoration

 

On vient de célébrer avec faste et solennité le soixante-dixième anniversaire du débarquement en Normandie. L’ouvrage de Jean Quellien se propose ici de raconter et d’analyser la bataille qui a suivi, d’une durée de plus de deux mois. Remarquable, bien documenté, facile à lire, il soulève cependant une question de fond que j’évoquerai en fin d’article.

 

Les raisons d’un succès

 

Si la bataille de Normandie se termine sur un succès, l’auteur montre que la tâche fut loin d’être aisée. Aguerris, mieux instruits, les soldats allemands menèrent un combat défensif efficace, tirant profit du bocage normand et bloquant les américains dans la bataille des haies. Les alliés l’emportèrent finalement grâce à leur maîtrise des airs (jamais la Lutwaffe ne fut en mesure de le leur contester), à leur nombre, à leur supériorité logistique. Et les troupes devinrent aussi meilleures, grâce à de formidables entraîneurs d’hommes comme Patton. En face,  le commandement allemand fut gêné d’abord par l’omniprésence d’un Hitler imposant des ordres sidérants et ensuite par des changements de commandants en chef, (Rommel, Von Kluge puis à la fin Model).

 

Le sort des civils

 

Longtemps oubliés, ils furent près de 20 000 à périr. Victimes des bombardements, des combats, parfois des exactions nazies, les civils payèrent un lourd tribut pour la libération. Si les alliés furent fêtés par la foule, ils n’en sont pas moins responsables : Le Havre, par exemple, fut détruite à 85 % et plus de 2000 personnes périrent lors du bombardement du centre ville, dépourvu d’installations militaires. Le livre de Jean Quellien a le mérite de rappeler, de raconter ces souffrances.

 

Le tournant de la guerre ?

 

La quatrième de couverture annonce la bataille de Normandie comme décidant du sort de la seconde guerre mondiale…S’il s’agit d’un formidable succès pour les Alliés, si ce fut incontestablement le prélude de la libération de la France, l’issue de la seconde guerre mondiale s’est décidée ailleurs. A l’est, l’armée rouge battit l’Allemagne nazie à Stalingrad où Hitler perdit 300 000 hommes et surtout à Koursk durant l’été 1943. Et la progression des alliés en 1944 fut facilitée par Staline qui lança l’opération Bagration : l’armée rouge acheva de libérer le territoire soviétique et rejeta la Wehrmacht sur la Vistule (Staline laissa néanmoins les nazis mener la répression de l’insurrection de Varsovie). Il s’agit ici d’un oubli répété de l’historiographie : la victoire en Normandie ne fut rendue possible que par les victoires soviétiques, chèrement payées.

 

Sylvain Bonnet

 

Jean Quellien, La bataille de Normandie, Tallandier, mai 2014, 390 pages, 21,90 €

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