Les Charlots font de la politique : Ian McEwan

Remède à la mélancolie le roman court et léger de McEwan illustre l'épisode de presque chaos total du Brexit anglais dans un texte de circonstances. Il rappelle forcément La Métamophose de Kafka.

Son héros - Jim Sams - est en effet un cafard au destin d'exception. Il se réveille dans le corps du Premier ministre britannique et sait qu’il a une mission à accomplir. Rien ni personne ne l’arrêtera dans sa volonté de porter la voix du peuple. Il a donc une destinée plus belle et lissée que le héros kafkaïen.

L'humour est d'ailleurs différent. Il se rapproche de Swift et des Monty Python dans la critique sociale désopilante où voit s'opposer deux camps. Non les Brexitteurs et leurs opposants mais mais les horlogers et les réservalistes.
Les premiers sont les élites si l'on entend par ce terme les adeptes de la raison et de la modération (pour preuve lisent The Guardian).
Les autres sont les populistes aux "fabuleux" slogans débités à l'emporte-pièce en guise de programme d'action. Ils font leur gorge chaude des tweets et de la presse à sensation.

Se comprend très vite qui va gagner et quel est le point de vue de l'auteur. Sa comédie flatteuse (mais pas pour tout le monde) s'apprécie dans sa résistance enjouée face à un monde de faux-semblants où les rouages impitoyables du pouvoir sont habilement démontés.

Le cafard est le bienvenu parmi les homo-sapiens sapiens mais ils sont si étranges que la bête a du mal à se faire à ce qui ressemble à du pétainisme à l'anglaise. Le pays de Charlot a retrouvé dans ses politiciens des héros d'un cinéma non muet.

Jean-Paul Gavard-Perret

Ian McEwan, Le cafard, traduit de l'anglais par France Camus-Pichon, Hors Série Littérature, Gallimard, mai 2020, 160 p.-, 16 €

Sur le même thème

Aucun commentaire pour ce contenu.