Pierre Fankhauser : Sirius & le temple solaire

L’on ne peut que faire un parallèle avec la tragédie de l’ordre du Temple solaire (5 octobre 1994) dès les premières pages lues : une chorégraphie, un rapport d’enquête, un entretien avec une danseuse dont le corps commence à  refuser certains mouvements. Sinusoïde crue(lle) dans les rets du questionnement incessant, ce roman gothique – mais contemporain – plonge son lecteur dans des affres de solitude et de noirceur. Scalpel en main, Pierre Fankhauser découpe ce qu’il note de l’autre, perce le secret des âmes et devine ce que l’on veut lui cacher. La spirale semble infernale car sans fin, sans suite, vouée à s’abîmer toujours plus bas, entraînant avec elle tout ce à quoi vous pourriez vous raccrocher…


C’est théâtral, perturbant comme un film de David Lynch, inquiétant, cela demande un minimum d’attention, un petit effort de concentration, quelques notions d’actualité et d’histoire locale, mais c’est aussi déstabilisant qu’un grand verre de vodka bu d’un trait. Une sorte de gifle intérieure qui vous ramène sur les rives d’un lac bien trop grand, bien trop noir, bien trop profond pour que vous osiez vous y aventurer seul. Alors vous reprenez une bouffée d’air et recouvrez votre lecture, lentement, pesant chaque mot car, même s’il donne l’impression d’avoir déjà été lu, repris, répété, la phrase, la phase, l’endroit n’est pas exactement le même, reflet d’une hypothèse, miroir d’une désillusion, bris, parcelles, esquilles… toutes ces vérités écartelées pourraient-elle, enfin, faire un tout, ici réunis dans un écrin de papier…

 

Plus que l’histoire, c’est bien la manière de narrer les faits, de tricoter le récit, qui donne à ce premier roman sa singularité, donc son intérêt, sa raison d’être… Une voix nouvelle dans la littérature suisse. À suivre.

 

François Xavier

 

Pierre Fankhauser, Sirius, BSN Press, coll."Fictio", Lausanne, mai 2014, 136 p. – 16.75 €

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