Le printemps des barbares de Jonas Lüscher : Péripéties délirantes

Dans un décor paradisiaque, hôtel grand luxe fait de tentes au milieu du désert tunisien, le narrateur assiste à la transformation progressive d'un groupe de traders londoniens venus célébrer un mariage, de golden-boys en barbares dès lors qu'à la suite d'une incroyable succession d'événements douloureux le premier ministre anglais doit annoncer la faillite de l'Etat et que tous les piliers de leur culture s'effondrent. 

"A cet instant précis, la facture du mariage qu'ils devaient payer en dinars tunisiens avait déjà atteint sterling le prix en livre sterling de leur maison mitoyenne à Londres, qui appartenait encore à 80 % à la banque, une banque dont les avocats annonçaient à l'instant même l'insolvabilité, envoyant un mail à tous les employés leur suggérant de venir aujourd'hui au travail munis d'un grand carton."

Dès lors, les jeunes gens sur-civilisés vont se transformer en horde. Le narrateur les observe, lui assis sur un héritage industriel suisse (on notera l'opposition entre la finance traditionnelle et assise sur la matière et la finance moderne assise sur les simples spéculations). Voici le projet du roman : montrer qu'il n'y a pas loin de la meute des traders à la meute des barbares... 

Si le projet est plutôt amusant et le roman en lui-même très bien mené, et que le lecteur prend beaucoup de plaisir à suivre ces péripéties délirantes et les étonnements du narrateur, il reste un léger goût de caricature dans le procédé et la morale trop clairement affichés — même si l'effondrement de l'Angleterre est un vieux rêve ! (1) 

Loïc Di Stefano

Jonas Lüscher, Le Printemps des barbares, traduit de l'Allemand (Suisse) par Tatjana Marwinski, J'ai lu, août 2016, 217 pages, 6,70 eur

le roman a reçu le prix Franz-Hessel 

(1) On lira avec plaisir La Bataille de Dorking, où la Prusse envahit l'Angleterre... 

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