Jacques Cauda : Watteau et haute tension

Jacques Cauda est un bûcheur infatigable. Iconoclaste il élabore bien plus que du croustillant par sa peinture et son écriture. Souvent il faut que ça saigne et les Saintes Sexo sont obligées devant certaines fatigues extrêmes d'implorer une pitié pour leur mont de piété. Mais parfois Cauda retient la bride. Pour preuve "L'amour la jeunesse la peinture", opuscule sans crépuscule puisqu'il renvoie à l'aube de l'éducation qu'on nommera sentimentale. Et ce aux côtés de deux potes qui eu égard à leur appendice (non nasal) se nomme "Petit Muscle et Saucisson". Pour autant l'auteur n'en fait ici pas des tonnes ; ici il faut que ça soit simple et que ça claque reste son mot d'ordre. Bref il sort du kitsch qu'il sait parfaitement pratiquer mais qu'il évite afin de ne pas surjouer des scènes de la vie quotidienne. Il y a donc là moins du Pierre et Gilles que du Gilles de Watteau sorte de double de l'auteur.

L’auteur sait que l’émotion littéraire n’est pas dénuée d’une émotion artistique. Les techniques sont nombreuses pour donner aux textes des “ moyens ” de compléter voire de dire ce que leurs mots ne font pas. Et ses allusions picturales permettent au besoin de franchir le pas au-delà de ses propres mots. Mais c’est presque superfétatoire tant le récit est un régal. Il reste affaire de perception avant qu’histoire de sens. Les mots tatouent la page comme une peau. Elle se déplie ou se déploie selon diverses procédures dans la sculpture d’ensemble d’une aventure sexuelle - et bien plus. Ce qui semble fuyant et reproductible à l’envie prend une toute autre dimension. Bref le livre réinvente dans divers formats et (im)postures l’amour, la jeunesse, la peinture.

Jean-Paul Gavard-Perret

Jacques Cauda, L’amour La jeunesse La peinture, coll. « Opuscule », Editions Lamiroy, Belgique, 40 p., 4 €

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