Pour saluer Melville traduit en japonais

Poursuivant avec persévérance son passionné autant que passionnant travail de traducteur de Giono en japonais, Satoru Yamamoto fait cette fois-ci paraître sa version, peut-on dire, de Pour saluer Melville en lequel ce dernier déclare en parfait alter ego de Giono vendant ainsi, pour sûr, la mèche d’un tel livre : Je me suis souvent dit : Il se pourrait qu’un jour, marchant sur un chemin quelconque, tu traverses, sans t’en douter, une barricade mystérieuse.
Et ce fut le cas comme pressenti, à l’improviste : en effet, y voilà d’évidence Giono très vite entraîné au large, en pleine mer de l’écriture, inspiré de toutes parts depuis son minuscule bureau du Paraïs, projeté tout à fait au-delà de ce qui devait, prévu au départ, être la rédaction d’une simple présentation de Melville en guise de préface au Moby Dick alors encore tout fraîchement traduit en collaboration avec Joan Smith et Lucien Jacques.
Préface dépassant aussitôt les bornes, foisonnant à la fois en roman, biographie, confessions, théâtre et art poétique, comme aussi bien en journal de voyage. À vrai dire se changeant en un ouvrage inclassable de par la multiplicité des genres qui s’y trouvent mélangés, ou croisés, et par lesquels le lecteur, en témoin privilégié de l’aventure d’écrire, est même installé aux toutes premières loges par-dessus l'épaule de l'écrivain aux prises avec l’ange de la création ; inventant à eux deux, par exemple, en direct sous ses yeux, une très exquise Adelina White mythique quoique initialement et réellement rencontrée - éblouissante muse - deux ans plus tôt à …Manosque même !

D’une rare puissance narrative, ce formidable chandelier à au moins cinq ou six branches illumine de l’intérieur l’œuvre de Giono tout entier, en même temps que faisant, dix ans à l'avance, une nique parfaite à ce qui sera le Nouveau roman ! Heureux donc que, grâce à Satoru Yamamoto, les lecteurs japonais puissent, par cette traduction, désormais disposer d'un tel puissant éclairage.

J'ai choisi une photo prise au Contadour pour illustrer la couverture du livre, parce qu’au Japon on aime tellement la lavande et que je n'ai personnellement pas de photos de Suisse, ni d'Angleterre, ni des États-Unis, écrit-il.
Du bleu-lavande ? Dites-moi, entre nous, quoi de mieux, en le cas, pour invite à un tel voyage !

PS : la présente édition comporte la traduction du mystérieux Déserteur dont il faudrait aussi faire l'éloge.

André Lombard

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