Jean-Philippe Toussaint : l'urgence et l'attente

Jean-Philippe Toussaint place l'incertitude de Monet vieillissant au cœur de son texte. Elle participe à une thématique qui fascine l'auteur depuis ses premiers romans et essais. L’urgence et la patience comme La mélancolie de Zidane montraient déjà les moments où tout s'engage, se dégage ou bascule.

Dans les neufs paragraphes qui constituent ce livre tout est affaire de précision, de balancier, d’équilibre. Une goutte de pluie peut faire chuter le funambule. Un entre deux vibre et atteint l’harmonie dans la finesse du style.

Toussaint est présent dès que Monet entre dans l’atelier. Il s'insère dans le lieu et ose son murmure : C’est le moment du jour que je préfère, c’est l’heure bénie où l’œuvre nous attend , fait-il dire à celui qu'il rêve et fait revivre.

L'auteur montre un homme qui travaille dans l’incertitude. Il ne sait comment finir ces Nymphéas ou plutôt comment les agencer en un inachèvement. Les terminer reviendrait à mourir. C'est pourquoi de son vivant et quoique sollicité par son ami Clémenceau, il ne laissera pas les grands panneaux quitter l’atelier pour rejoindre l’Orangerie. Demeurera en outre, quelque part sur leur surface, un pan vierge et en attente.

Jean-Paul Gavard-Perret

Jean-Philippe Toussaint, L'Instant précis où Monet entre dans l'atelier, Minuit, mars 2022, 32 p.-, 6.50 €

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