Armand Dupuy "lecteur" de Jérémy Liron

L'essai d'Armand Dupuy est bien plus qu'une simple monographie sur l’œuvre de Jérémy Liron. L'auteur plonge dans ses arcanes et son approche se prolonge par divers entretiens avec Philippe Agostini, Gilles Altieri et Léa Bismuth. C’est une manière de faire surgir une réalité plus profonde dans ce que l’œuvre possède de symbolique, de fantastique en un traitement plus alchimique qu'avénementiel du réel.

Dans le cadre de la toile Liron propose prises et balisages sous effets de variations. L’artiste sait en effet combien franchir la frontière de la représentation touche à notre plaisir, à notre jouissance et, sans doute, à nos possibilités d’angoisse puisque nos certitudes se voient interpellées par cette traversée.
Liron déploie un autre lieu en une sorte d’acte poétique que Dupuy reprend à sa main. L’œuvre gagne alors en ouverture en jouant avec le principe de réalité pour faire glisser en un principe de plaisir.

Un tel travail ne représente pas un simple exercice de style : il s'inscrit dans la prédiction mallarmméenne qui donne à l'art tout son sens : Rien n'aura lieu que le lieu. Cassant le chaos par ses géométries parfaites, l'artiste immobilise ce qui devient une suite de moments intempestifs à travers des surfaces qui deviennent des corpus d’interrogations.

De telles peintures ni attirent, ni accueillent ouvertement. Il faut s'y engager en faisant abstraction des manières de considérer un tableau, pénétrer ses cavités, ses quartiers de couleurs. Suivant leur exposition la clarté s'y reflète différemment. C'est moins une venue de lumière qu'une sorte de ruissellement. Le regard s'emplit de ce déversement guidé d'un suspens filtré et dirigé par les pans travaillés.

Jean-Paul Gavard-Perret

Armand Dupuy, Jérémy Liron – récits, pensées, dérives et chutes, préface de Marc Desgrandchamps, L'Atelier Contemporain, coll. "Monographies", janvier 2020, 300 p., 35 euros

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