Le vieux saltimbanque, requiem pour un grand écrivain

Harrison : une trajectoire

Jim Harrison est un aventurier de la littérature ! Aveugle de l’œil gauche depuis son enfance, il décide à 16 ans, il décide de devenir écrivain et quitte le Michigan pour vivre la grande aventure (sur le mode beatnik) à Boston et à New York. Il ne cessera jamais d’écrire, finissant même par attirer l’attention d’Hollywood : son recueil Légendes d’automne, sera adapté au cinéma par Edward Zwick avec Brad Pitt en 1994. Rappelons qu’il a aussi écrit une adaptation de sa nouvelle vengeance pour Tony Scott en 1989 ainsi que le scénario de Wolf en 1994, sympathique nanar (qu’on espère très bien payé !) avec une magnifique Michelle Pfeiffer (mon médecin me déconseilla autrefois de voir trop de films avec cette actrice). Le vieux Saltimbanque constitue sa dernière publication de son vivant, Jim Harrison expliquant dans la préface  qu'il a décidé de « poursuivre ses mémoires » sous la forme d'une fiction à la troisième personne .  

Harrison, la vie tout simplement

 

« Depuis son soixante-dixième anniversaire, ces amis du bar l’appelaient « le vieux ». Ce nouveau sobriquet l’amusait au lieu de l’agacer. La plupart d’entre eux était quinquagénaires. Deux ou trois, âgés de moins de trente ans, étaient admis à la table sacrée car ils les considéraient comme de bons écrivains. Ces habitués étaient de vieux amis artistes, lesquels se montraient toujours plus vivaces avec les vieux écrivains. Et puis ils cuisinaient beaucoup mieux que les poètes et les romanciers, même s’il ne savait absolument pas pourquoi. »

 

Souvenirs d'enfance, mariage, amours et amitiés, pulsions sexuelles et pulsions de vie passées au crible du grand âge, célébration des plaisirs de la table, alcools et paradis artificiels, Jim Harrison nous donne ici sa recette pour vivre, par-delà la mort. Après avoir lu ce mini-roman, expression réductrice qui ne rend pas compte de son talent, on reste finalement bouche-bée. Véritable testament littéraire d'un artiste qui sent la fin approcher, Le Vieux Saltimbanque est à l'image de Big Jim, plus libre et provocateur que jamais, plus touchant aussi, en marge de toutes les conventions. A lire et à savourer, il n’y en plus beaucoup des comme ça…

 

 

Sylvain Bonnet

 

Jim Harrison, Le vieux saltimbanque, traduit de l’anglais (États-Unis) par Brice Matthieussent, Flammarion, septembre 2016, 144 pages, 15 €

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