Le bistrot, Paris, la nuit et… Joseph Roth

À l’énoncé de l’auteur, on pense tout de suite à Philip Roth mais on se fourvoie. L’homonyme est Autrichien, Joseph Roth (1894-1939) compris très vite l’idée générale d’Hitler et s’exila en France. Il fréquenta les nuits parisiennes dès 1925 – envoyé comme reporter puis après le putsch nazi en 1933), succomba à l’alcool et y perdit la vie. Il nous laissa deux grands romans (La Marche de Radetzky et La légende du saint buveur) et ces quatorze instantanés, photographies désuètes d’un Paris disparu, d’une âme populaire qui n’est plus.  

Journaliste avant d’être écrivain, Roth apprit très vite la sens de la formule, aiguisa son œil et imposa un style particulier, une manière de raconter les milieux populaires avec grâce et respect. Il a toujours eu un faible pour la France, et un grand enthousiasme pour la capitale. Et déjà il s’insurge contre les ravages de la publicité (sic) autant dire qu’il doit faire des doubles saltos dans sa tombe en voyant les panneaux gigantesques qui dénaturent les immeubles et autres musées…  

Ce sera l’un des premiers à dire je et à engager sa sensibilité, prenant en toute logique le contre-pied de l’objectivité généralement attendue dans le domaine du journalisme ; ce qui lui permet de se tenir à distance du canon de la chronique journalistique et de pouvoir creuser son sujet, proposer des idées, dénoncer des hérésies. Il n’est pas obsédé par l’objectivité du matériau présenté, il préfère l’enrober dans l’histoire qu’il relate car elle le rapproche du quotidien. Roth marque son intérêt pour les gens dits ordinaires plus que pour les grands hommes, dont aucun, d’ailleurs, n’apparaît dans ce recueil, si ce n’est une seule fois sous la forme de mannequins de cire, qui fait dire à Roth : Je dessine le visage de notre époque. Je suis journaliste, pas échotier, je suis écrivain, pas éditorialiste. 

 

 

Rodolphe 

 

Joseph Roth, Au bistrot après minuit – et autres textes sur Paris, traduit de l’allemand et préfacé par Pierre Deshusses, Rivages, juin 2021, 112 p.-, 15 € 

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