Le Bulletin des amis du musée PAB célèbre Julius Baltazar : hôm-mage royal !

Vous avez jusqu’au 22 juin 2014 pour vous rendre au musée PAB. Pardon ? PAB ? D’accord, reprenons au commencement : PAB, pour Pierre André Benoit qui fut un extraordinaire touche-à-tout, à la fois peintre, poète, graveur, typographe, etc. mais surtout éditeur d’art et collectionneur, et qui fit don de sa collection à sa ville natale. Ainsi, le musée-bibliothèque PAB (Alès) vit-il le jour.

Aujourd’hui, il reçoit l’un des trublions de l’art contemporain : Julius Baltazar, ce calligraphe du futur et peintre du monde, pour un hôm-mage digne des plus grands. Et pourquoi pas ?! Puisqu’il est l’un des tout grands de l’art moderne/contemporain, arrêtons avec les étiquettes, d’autant que notre artiste est à la fois peintre, graveur, calligraphe aussi, poète à ses heures et bien souvent contrepêteur de très haute volée : vous auriez été présent lors du vernissage, vos zygomatiques en seraient encore tout courbaturés…

Le Bulletin des amis du musée PAB accompagne, dans son numéro 22, cette splendide exposition, proposant trente exemplaires de tête avec un monotype original de Julius Baltazar, numéroté et signé.

 

 

Une manière de déployer en quelques pages l’étendue des merveilles qui vous attendent. Le musée, abrité dans une ancienne demeure articulée autour d’un monumental escalier, livre, pièce après pièce, sous des hauteurs vertigineuses de plafonds moulurés, des ambiances différentes, selon les œuvres exposées. Une scénographie que l’on doit à son conservateur, Carole Hyza (et à son adjointe Flavie Le Plapoux) qui confirme la formidable vivacité créative et l’engagement total des institutions culturelles de province, comme l’avait démontré Maïté Valès-Bled lors de l’exposition, à Sète en décembre 2012, consacrée aux livres d’artiste de Salah Stétié :  Paris n’est plus, et depuis longtemps déjà, le centre cardinal.

Que vous habitiez Nîmes, Béziers, Montpellier ou tout autres villes, villages, hameaux de la région, s’il vous plaît, faites l’effort de quelques kilomètres à parcourir pour venir voir cette exposition-là, et pas une autre !
D’ailleurs, détail significatif : je n’ai jamais entendu, lors d’un vernissage, autant de compliments ni vu de personnes se précipiter sur leur téléphone pour appeler leur entourage afin de les inciter à prendre le temps de passer au musée.

Une première pièce claire-obscure vous accueillera, le temps que vos yeux s’habituent aux éclairages faiblement denses mais diablement bien orientés, vous découvrirez combien ils surlignent les évidences que l’œil ne verrait pas à la lumière du jour. Dans cette ouate feutrée, vos iris seront happés par un bleu, un rouge, une touche de blanc, l’explosion d’une zébrure ; vous baignerez d’emblée dans l’univers Baltazar et alors le voyage s’annoncera délicieux…

 



Seconde salle : un immense triptyque vertical, colonnes lavande et sienne sous les ronces d’un déchirement qui vous tireront des larmes de nostalgie si vous restez à le contempler un peu trop longtemps. Alors la troisième salle vous apaisera avec des toiles plus petites, une guitare peinte à droite de la cheminée (avec laquelle un virtuose du blues nous envoûta lors du vernissage) et un époustouflant tableau 3D qui s’amuse de vous comme La Joconde au Louvre. Face à lui, de près vous voyez un certain panorama, en vous reculant, dès cinq six mètres, vous ressentez une profondeur, un relief hallucinant au centre, puis, les deux parties, gauche et droite, s’élancent vers un battement saccadé qui vous rappelle que vous êtes en train de vous faire manipuler. Vous vous décalez sur le côté, seconde gifle, le tableau se joue de vous derechef car c’est lui qui donne le tempo, vous n’êtes qu’un regardeur, vous n’avez pas oublié ? Baltazar vous a envoûté, ses œuvres vous dominent, vous n’êtes qu’éther désincarné et c’est très bien ainsi, une exposition n’est pas un concours mais un baume pour l’âme…
 

Reprenons, quand vous parviendrez à vous extraire de l’envoûtante toile, vous prendrez un petit couloir avec, à votre droite, une série de mini-mini-tableaux (la plupart peints en Corse) puis vous monterez à l’étage supérieur. Dédié aux œuvres sur papier, vous serez une fois encore emporté par la vague baltazarienne qui déferle en rouleaux successifs pour redessiner les plages de la peinture. Roseaux, barbelés, broussailles, griffures, éclairs, morsures, lumière, trou noir : que de contradictions dans ces papiers peints d’infernales sensations. Trouble qui vous piquera le ventre, désir qui vous chatouillera les doigts, ricochet sur quelques vers de Salah Stétié ou Michel Butor qui s’infiltrent entre les strates pour inviter à prendre place, s’ébrouer au cœur de l’œuvre, se l’approprier et en jouir !

 

D’ailleurs, le dernier étage est entièrement consacré à la fleur syntaxique : domaine des livres d’artiste, il vous démontrera toute la panoplie des possibles dont Julius Baltazar est capable : archi-mini livres (quelques centimètres seulement !) ou œuvres monumentales, gravures, lithographies, linographies, peintures originales, tout y passe, tant l’artiste est féru d’inventions et incapable de s’interdire : une inspiration ? il la réalise aussitôt dans son atelier fourre-tout et la ponctue de son célèbre crayon arlequin. Sous vitrines, des bijoux bibliophiles s’étirent, se vautrent dans la luxure d’un voyeurisme autorisé quand les mots font l’amour aux pigments, qu’un poète s’enflamme pour un peintre, qu’un graveur pénètre l’univers d’une allégorie, c’est feu d’artifice !

Eau et gaz à tous les étages, chantait Gainsbourg : au musée PAB c’est plaisir et gourmandise, autant dire que les interdits y sont bannis…

 

François Xavier

 

Les amis du musée PAB, numéro 22, publié par l’Association des Amis du Musée-bibliothèque Pierre André Benoit, mars 2014, 30 p. – 3,00 € (tirage courant) – 50,00 € (tirage de tête).

 

Musée-Bibliothèque Pierre André Benoit, rue de Brouzen, 30100 Alès.

Ouvert tous les jours de 14h à 18h : entrée gratuite

 

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