L'Assassinat de Marilyn Monroe, témoins à charge

Voici un livre qui tombe à pic : au moment précis où un ancien agent de la CIA (Norman Hodges) a affirmé sur son lit de mort que Marilyn a bel et bien été assassinée. Certes on peut se demander ce que la CIA avait à voir avec le sex-symbol et si M. Hodges n’avait rien d’autre à raconter avant de défunter, mais peu importe : cette information relance la polémique.

Alors que, de son côté, le livre y met un point final : il y a bien eu meurtre. Les auteurs vont plus loin et balancent le nom de celui qui a provoqué la mort ainsi que des témoins présents et de celui qui l’a commandité. Pour ne rien gâcher du plaisir du lecteur, je tairais ces noms. Même s’ils sont lisibles dès le premier chapitre !

Depuis plus de cinquante ans que miss Monroe a passé l’arme à gauche, on se pose des questions (le « on » étant essentiellement américain). La thèse officielle du suicide parait sujette à caution. Alors accident ou meurtre ? Et si meurtre, pour quels motifs ? Suspense, suspense…

Rappelons-nous que Marilyn est, de très loin, l’actrice sur laquelle ont paru le plus d’ouvrages. Encore que tous n’ont pas franchi l’Atlantique. Évoquer un nombre dépassant la centaine n’est en rien exagéré. En voici un de plus. Qui ne se concentre que sur le décès de la comédienne. Il fait « suite », entre autres, à Marilyn histoire d’un assassinat (Plon, 1992) et Marilyn Monroe, enquête sur un assassinat (Albin Michel, 1998). Tout cela tend à prouver que la thèse de l’assassinat ressort le plus souvent !

Qu’ont fait les auteurs, Jay Margolis et Richard Buskin, après un demi-siècle ? Ils ont tenté de retrouver des témoins. Pas facile car la plupart sont eux aussi décédés. Des témoins forcément indirects ou n’ayant qu’un lointain rapport avec l’affaire. Mais des témoins quand même. Qui tous, dans un bel élan, réfutent l’hypothèse du suicide et sèment derrière eux plus de points d’interrogation que le Petit Poucet de cailloux. Par ailleurs – et c’est là le gros de leur travail – lesdits auteurs ont lu et relu tout ce qui est paru sur Marilyn et ses dernières heures. Ils en font la synthèse reprenant dans des livres, des revues ou des documentaires des témoignages qui viennent étayer leur conviction.

Car, le titre de l’ouvrage est là pour le rappeler : ils sont convaincus que Marilyn a été assassinée. Pas un accident de parcours, un homicide involontaire : un assassinat. Donc prémédité. Bigre !

Je me garderai bien de juger les résultats de cette enquête. Il faudrait reprendre chacun des arguments pas à pas, se faire l’avocat du diable et disséquer toutes les informations. Je préfère me contenter de jauger l’ensemble. C’est du travail à l’américaine : mené tambour battant avec des « révélations » qui claquent comme autant de coups de tonnerre. On se croirait dans un épisode de Perry Mason !

Néanmoins, les limiers ont une fâcheuse tendance à la répétition (on a bien compris qui avait enfoncé la seringue mortelle !) et à partir sur des chemins de traverse (tout le personnel ambulancier de l’époque y est passé au crible !).

Bien qu’ayant lu flopée de livres sur Marilyn, je ne peux m’ériger en spécialiste de sa mort. Je n’ai lu que ce qu’on a bien voulu publier et non l’intégralité des témoignages, des documents exhumés, etc. Et ma conclusion n’intéresse que moi (et quelques amis en mal de conversation). Je note cependant que Margolis et Buskin fondent une grande partie de leur raisonnement sur deux planches pourries. Peter Lawford était à la fois un très mauvais acteur et un mauvais ami. Il suffit de relire les livres sur le Rat Pack pour savoir que Sinatra, Martin et consorts le tenaient en piètre estime. Alors l’impliquer dans un meurtre me parait audacieux… Quant au détective Fred Otash, il fut le pire fouille-merde de l’histoire d’Hollywood. Passé maître dans l’art du chantage, il servit de support à tous les ragots d’Hollywood Confidential, torchon à scandales à côté duquel nos Voici, Closer et consorts font figure de bénis oui-oui. Prendre pour argent comptant ses déclarations au sujet de Marilyn me semble aussi stupide que croire Hitler quand il annonçait sa volonté de laisser l’Europe en paix.

Pour le reste, le livre se lit aisément. Les personnages y pullulent mais, pour qui connait un tant soit peu l’histoire de la star, on s’y retrouve sans problème. Il peut aussi constituer un intéressant sujet de débat. Car, en vérité, il pose plus de nouvelles questions qu’il n’en résout. Le propre de ce genre d’enquête. A s’enfoncer dans cette « intrigue » on a l’impression d’assister à un ersatz du JFK d’Oliver Stone, avec tout ce que cela comporte de spectaculaire et de ridicule.

Pour terminer je soulèverai un lièvre qui me turlupine depuis longtemps. En ces années 60, les téléphones portables n’existaient pas (eh non !). Or tous les personnages du livre ne cessent de s’appeler les uns les autres. Confondant souvent les horaires, ce qui ne simplifie rien. On nous dit que les relevés téléphoniques de Marilyn ont « disparu ». Mais les autres, tous les autres. Pourquoi personne n’a jamais pris soin de vérifier toutes les lignes téléphoniques concernées et de pointer à la fois les heures, les durées et les provenances des appels ? Enfin je dis ça, je ne dis rien.


Philippe Durant


Jay Margolis et Richard Buskin, L'Assassinat de Marilyn Monroe, affaire classéeL’Archipel, avril 2015, 304 pages, 21€


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