Jean de Breyne : lectures publiques

Ce livre rassemble quelques 150 photographies de graffitis marseillais que Jean de Breyne a retenus pour leurs mots et leurs graphismes.
Chaque anonyme scripteur présente sa vision du monde contre l'oubli et avant l'engloutissement et la perte à l'épreuve du temps. Le tout à travers des perceptions plus ou moins profondes ou ludiques.
Du ventre de la société et face à ses préjugés les mots sortent de leur propre coquille de manière excentrée, excentrique. Ils différencient le travail du deuil à celui de la mélancolie, de la drôlerie au tragique. La vie se creuse, se mange du dehors comme du dedans.
Cela revient à tatouer à même les murs les mots pulsions. Ils habitent et travaillent des "engendreurs" qui – lorsqu'ils sont plus ou moins lettrés ou à court d'idées – les empruntent à d'autres poètes.
En conséquence l'art de Jean de Breyne demeure fidèle à la condition humaine. Il décrypte des infirmités à travers des affirmations en ellipses, assonances, asymptotes propres à illustrer ce qui affecte et grignote.
Les graffitis sont donc des bretteurs envers la vie. Les scripteurs s'y débattent comme ils le peuvent. Et le photographe illustre comment passer de l'abîme au paroxysme de l’idéal.
Le tout dans de folles germinations que le livre permet de lire avec plus d'attention et dans un art habile du cadrage, qu'en passants trop pressés et si peu attentifs à ce que les mots fondent.
Jean-Paul Gavard-Perret
Jean de Breyne, Phrases de la rue, préface de Michèle Aquien, éditions de L'Ollave, décembre 2020, 120 p.-
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