Valérie Rouzeau, Vrouz ! : Terriblement moderne

Parlons un peu poésie avec Valérie Rouzeau  et son recueil Vrouz !.

Et en préambule, un mot de la poésie en danger puisque la manifestation annuelle Le printemps des poètes voit sa subvention 2012 de l’Éducation nationale diminuer de 40 %, ce qui remet en cause l’édition du Printemps 2013. Vous pouvez d’ailleurs tenter d’œuvrer contre cette coupe drastique en répondant ici à leur appel contesta taire.

 

Dans ce monde de brutes, la poésie est le parent pauvre de la littérature, si absente des devants de tables des libraires ou des grandes enseignes culturelles, reléguée dans des rayonnages de fond de boutique et boudée par nombres d’éditeurs… parce que pas rentable. Ce mot fait injure au genre. Et à la littérature.

 

Pourtant, c’est bien avec la poésie que toutes générations confondues, nous avons fait — et faisons toujours — nos premiers pas en littérature.  

Avant même de se frotter à la lecture et à l’écriture, pas plus haut que trois pommes, l’enfant apprend avec cœur des poèmes, apprivoise les mots, se les approprie, éprouve ses premiers émois avec le rythme et la musique des phrases. Lire ou apprendre de la poésie, c’est découvrir la magie et la puissance du verbe, son pouvoir imageant qui sait dire avec liberté le monde, la vie, la joie, la tristesse, l’amour, la colère, la mort…

 

Le recueil Vrouz !  de Valérie Rouzeau  vient de récolter les lauriers du  prix Apollinaire 2012.

Je regrette d’avoir différé de rendre compte de la lecture du recueil de ces sonnets, car même sans cette récompense, Vrouz ! se devait vraiment d’être mis en avant.   

 

La poésie de l’écrivaine réenchante l’ordinaire. Terriblement modernes, ces cent cinquante poèmes badinent avec le temps et l’air ambiant. Valérie Rouzeau se fait un malin plaisir de jouer sa partition en quatorze vers libres, l’amusement fait partie du charme de ces pages, elle soupire parfois de la contrainte de la forme, mais d’une pirouette ses mots, même soumis à la règle du sonnet, jonglent à l’air libre, colorent et allègent le quotidien.

 

D’un rendez-vous chez le gynéco, de courses au BHV, d’un document de sécu ou  d’un passage à la douane d’un aéroport ou à la SNCF [Sur la carte rouge à l’œil bleu / De la bien bonne SNCF / Il est inscrit grand voyageur / Or je suis petite casanière], elle en fait une petite musique moqueuse ou nostalgique. Foin de formalisme et de sens interdits ! Vrouz dessille nos regards blasés, détricote l’ennui et pulvérise la retenue [Tout est parfait comment penser qu’on va mourir / On prend pour nous tellement tellement de précautions].

 

Ce qui est épatant avec cette femme, c’est sa façon réjouissante d’ancrer sa poésie dans le populo, loin de la préciosité. Non, la poésie n’est pas forcément absconse, réservée à une élite intello érudite. Et même si ce recueil est bourré de références littéraires qu’elles notent en fin de volume, Vrouz ! est un livre de chevet par excellence, une gourmandise sucrée salée à grignoter au lit pour se délivrer des civilités de la journée.

 

Anne Bert

 

Valérie Rouzeau, Vrouz !, La Table Ronde, « Vermillon », mars 2012, 176 pages, 16 € 

 

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2 commentaires

On pourra goûter avec bonheur un extrait de Vrouz dit par le comédien Jacques Bonnaffé :
http://soundcloud.com/compagnie-faisan/vrouz-valerie-rouzeau-1

-40%, c'est normal, nous sommes en crise, cela vous dit quelque chose ? quant au contenu de cette manifestation, si les restrictions peuvent aboutir à ce que la programmation soit plus stricte tant mieux car, ne vous en déplaise, il y a à boire et à manger, c'est très souvent mauvais, il ne suffit pas de faire des rimes ou de "jouer" avec les mots pour être poète, c'est comme le chanteur Grand Corps Malade, ses textes sont à pleurer de niaiseries débiles, ce n'est en rien de la poésie... encore une des plaies de cette époque qui veut que l'on mélange tout, nivelle tout, etc. tout le monde n'est pas poète, ni chanteur, etc.