La septième fonction du langage.

Roland Barthes a été assassiné : une camionnette de blanchisserie l’a renversé alors qu’il sortait d’un déjeuner avec François Mitterrand. Comme on est  à quelques mois de l’élection présidentielle de 1981, il s’agit probablement d’un crime politique. Pour le résoudre, un improbable commissaire Bayard est nommé, bientôt flanqué d’un thésard en linguistique, Simon Herzog.

Si le jeune étudiant est familier des termes propres à la sémiologie, il en va tout autrement pour le policier qui découvre avec effarement les beaux esprits germanopratins des années 70 et 80. Sollers et Kristeva, Foucault et BHL ou encore Umberto Eco, sans oublier Louis Althusser et sa femme. Tous  s’agitent, parlent, se reçoivent, se retrouvent parfois dans un back room glauque. Si on ajoute à ce cocktail, les Brigades rouges, de vrais tueurs au parapluie, des japonais ténébreux, quelques gigolos aussi peu farouches que désargentés, de très jeunes filles pour la décoration, on comprendra que Bayard est on ne peut plus perdu et très loin de mettre un terme au mystère. Tout le monde a son mot à dire : de Giscard alors président à Jack Lang qui livre sa version de l’affaire un peu plus tard, le soir du 10 mai 1981, tandis que « Badinter et Debray dansent une sorte de menuet ».


L’évocation de ce milieu intellectuel est irrésistible, le chaos est total et on ne sait plus trop qui est à l’origine de l’intrigue.


L’immense talent de Laurent Binet, prix Fnac 2015 est d’écrire un faux polar extrêmement drôle dans un milieu qui prête assez peu à sourire, dans une époque déjà lointaine.


L’auteur qui s’est visiblement amusé à construire un roman aussi divertissant qu’érudit promet au lecteur de grands moments de pure jubilation.


Brigit Bontour

 

Laurent Binet, La septième fonction du langageGrasset, août 2015, 496 p., 22 €

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