Lawrence Durrell : Biographie

Né à Jalandhar (dans la région du Punjab) en 1912 d'un père anglais et d'une mère irlandaise protestante, tous deux nés aussi dans l'Empire des Indes, Lawrence Durrell est un écrivain et poète anglais.

Son œuvre est marquée par ses nombreux voyages, notamment en et autour de la Méditerranée, région du monde où il aura passé l’essentiel de sa vie. Envoyé très jeune au Royaume-Uni pour y accomplir ses études, sa rencontre avec la mère patrie sera pour lui un choc : il refuse de passer ses examens, et finit par fuir ce pays qu’il déteste et qui pourtant coule au plus profond de ses veines. Il l’emmènera donc avec lui, dans ses voyages, à défaut de pouvoir y vivre. En 1935, déterminé à accomplir sa destinée d’écrivain, il convainc sa femme, sa mère, son frère et sa sœur à partir s’installer à Corfou. De là, il commencera à écrire ses premiers textes : deux romans sous le pseudonyme de Charles Norden, et nombre de poèmes. L’écrivain se cherche, et c’est une lettre, écrite à Henry Miller en réaction de soutien à la publication (et à la censure) de ses ouvrages de l’époque, qui va donner un nouveau tour à son travail. Débute alors une correspondance - disponible en français - doublée d’une amitié indéfectible qui réunira les deux hommes jusqu’à la mort de Miller, en 1980. D’abord sorte de rapport de maître à élève, elle deviendra très vite un échange enrichissant pour les deux hommes, tant sur le plan personnel que sur le plan littéraire. En 1938, il écrit ce qu’il considère comme son premier vrai roman, Le livre noir, ouvrage sombre que l’auteur alla chercher au plus profond de lui-même, comme si le seul moyen pour lui de s’assumer en tant qu’écrivain était de mettre ses entrailles à nu.

Forcé de quitter Corfou puis la Grèce durant la seconde guerre mondiale, Durrell s’installe en Egypte en 1941, puis se sépare de sa femme en 1942. Alexandrie sera le lieu de rencontre de sa nouvelle femme, Eve Cohen. Lieu et femme seront ses inspirations pour la rédaction du roman pour lequel il passera à la postérité, Le Quatuor d’Alexandrie. Ecrits entre 1957 et 1960, les quatre romans qui constituent le Quatuor représentent la tentative par Lawrence Durrell de retranscrire l’esprit d’une ville et d’un amour qu’il vécu dans celle-ci. Cet ensemble allie une histoire d’amour à un traitement choral plus proche de la musique - on peut assimiler les quatre romans, Justine, Balthazar, Mountolive et Cléa, aux quatre mouvements d’une symphonie - que de la littérature, ayant pour base le principe de la relativité d’Einstein appliqué à son récit et à ses personnages : l’histoire évolue en fonction de celui qui la raconte ; toutes ces histoires sont vraies, puisque ceux qui les racontent en perçoivent la réalité de leurs points de vue respectifs. Et pourtant, chaque récit apporte richesse et densité aux précédents, et en permet à chaque fois une nouvelle compréhension. On comprend pourquoi le cinéaste Joseph Mankiewicz, qui joua avec brio de la narration chorale dans Chaînes conjugales et Eve, projeta pendant des années d’adapter le Quatuor.

Durrell a mis tout ce qu’il avait, tout ce qu’il était dans cette œuvre, histoire d’amour, chronique de la ville d’Alexandrie d’avant la seconde guerre mondiale, où les différentes communautés, musulmane, copte, juive, vivaient dans un équilibre complexe et précaire, que la déflagration mondiale puis la naissance d’Israël feront voler en éclat.

Il quitte l’Egypte et s’installe à Chypre en 1952. L’insurrection des Chypriotes grecs contre le pouvoir britannique le forcera à quitter le pays en 1955, et il passera la fin des années 50 à voyager pour le Foreign Office, de Belgrade à Buenos Aires. Il posera finalement ses valises au début des années 60 en France à Sommières, toujours au contact de cette Méditerranée qui l’aura marqué jusqu’au bout, et à laquelle, outre le Quatuor, il consacrera nombre de ses romans, poèmes, pièces de théâtre et récits de voyages.

Lawrence Durrell décède d’une crise cardiaque en 1990.

L’année 2012 aura marqué le centenaire de la naissance de l’auteur. La maison Buchet-Chastel, son éditeur français depuis 1957, a ainsi réédité le Quatuor, et a choisi de livrer au public son premier roman, inédit, Petite musique pour amoureux. Au-delà, une nouvelle édition du récit de sa vie à Chypre durant l’insurrection, Citrons acides, a été publiée. Pour les amoureux de la Méditerranée, on conseillera, entre autres, la lecture de son Guide des îles grecques, ou encore Le carrousel sicilien, récit de vacances tendre et drôle. Enfin, si l’on veut goûter à son sens de l’humour corrosif, il conviendra de dévorer ses chroniques diplomatiques, Affaires urgentes. De manière générale, l’œuvre de Durrell, sensible, poétique, drôle, philosophique, mérite d’être redécouverte.

Glen Carrig
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