Jacques Richard et le secret du temps

Jacques Richard refuse la poésie nostalgique comme hyperréaliste. Non que le flou domine mais dans son livre les paysages ne comptent pas ou peu. À l'exception de celui de l'aimée. Pas question pour autant d'en faire le relevé géographique même si les reliefs sont à n'en pas douter des plus avenants au sein de quelques rides.

Le corps est donc aussi grandiose que réduit, loin et proche. Car le retrouver ne fut pas toujours chose facile. Mais là encore exit les anecdotes. Et le "rien" tel que l'auteur l'entend devient une façon d'éliminer ce qui est superfétatoire.

À mesure que le temps passe, les pages d'amour sont comptées et il faut les pénétrer comme un état de seconde nature. Là où le paysage devient abstrait, il demeure un lieu incarné en tension. Sans la moindre blabla, il circule en liberté pour "endormir la raison".

C'est ainsi que s’y engagent tout le mental et l’émotion dans la conjonction du temps et de l'aimée. Poétique par excellence l’œuvre ne cherche pas la séduction mais une précipitation selon différents effets de pigmentations des atomes crochus. La peau devient un champ magnétique d’une sensualité aérienne, diffuse. 

Demeure aussi une puissance tactile là où le fantasme est remplacé par le mythe. Un mythe maritime où la femme devient une des lames nues qui inondent le parcours d’ombre des saisons. C’est aussi une traversée, un gouffre de sensations. La gravité est là mais s’y renverse tout autant.


Jean-Paul Gavard-Perret

Jacques Richard, Sur rien mes lèvres, Le Cormier, Bruxelles, septembre 2021, 58 p.-, 14 €

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