JB Hanak : vies de chien

Mon grand frère, c’est Fred. La personne que j’aime le plus au monde. On fait de la musique depuis l’enfance. Deux gamins de Maisons-Alfort ; on a tout fait ensemble depuis le début. Notre premier album est  sorti début 2000. Fiers de tous nos disques, nous avons enchaîné labels miteux, tournées de bras cassés, ventes minables et promotion zéro. Dix années bien tassées à manger de la vache enragée, écrit le narrateur auteur d'un livre qui en devient l'hommage.

Le livre avance en n'ignorant rien de ce qui sommeillait et couvait en des lieux interlopes où le métier de musicien oblige parfois à se fourvoyer en un certain désordre vital où il faut parfois remiser son orgueil pour qu'il se bande contre les énergumènes qui n'ont de shakespeariens que la bassesse.

Si JB Hanak est musicien - avec Frédéric Hanak, ils ont créé le groupe Damage baptisé par la presse musicale, les Moutons noirs de la French touch et ont été reconnus et salués pour leur parcours artistique sans concession - il est aussi artiste et écrivain.  Sales chiens est son premier roman et il dépote comme ses oeuvres musicales et plastiques.

Il transforme les années de galère et de frustration en épopée vitale et langagière. Tout sonne juste en des pages grouillantes, incisives, violentes mais plein d'amour fraternel pour Fred. Le roman retrace l'itinéraire des deux frères comme le rappelle de nombreux détails remontés parfois de Maisons-Alfort : Lorsqu’on était gosses, son meilleur ami à l’école était un fils de flic. On raffolait de toutes les histoires tordues que ce mec  tenait de son père. Dont celle du chien invisible : Ourko.

Celui-ci va devenir le fil rouge d'un livre où d'autres chiens plus concrets et sadiques qui viennent donner du mordant à un périple qui se serait bien passée de tels carnassiers. Mais ainsi va la vie de rocker.
Beaucoup aurait fini par perdre les pédales. JB Hanak a tenu et fait que la vie de son frère perdure.

L'écriture est en bourrasque mais elle est toutefois tenue au sein des bouledogues d'ici et d'ailleurs, d'hier et d'aujourd'hui. D'autant que l'auteur ne livre pas un brulot ras du bitume. Il a mieux à faire même si le goudron se rappelle à lui. Il faudrait encore et toujours que Fred rapplique : Je te jure, t’es la dernière personne à qui je pense (...) y a personne de plus important que toi dans ma vie, Fred, t’es mon grand frère.
Et le roman devient une boucle écorchée mais sublime là où Ourko lui-même va se trouver enfin incarné.

Jean-Paul Gavard-Perret

J-B Hanak, Sales chiens, Léo Scheer, janvier 2022, 272 p.-, 17 €

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