Un portrait psychologique d'Henri VIII

Harriet Castor s’attaque ici à un monument historique : Henri VIII, roi d’Angleterre qui a inspiré le personnage de Barbe-Bleue. Racontée à la première personne, elle retrace en quelques épisodes marquants la vie de ce roi que l’on a qualifié de sanglant.

 

A Londres, un jeune garçon se réveille et est enlevé par sa mère qui le mène dans la Tour de Londres pour le mettre à l’abri des ennemis de son mari. Ce jeune garçon, c’est Henri, dit Hal, le second fils d’Henri VII et d’Elisabeth d’York. Au cours de son séjour, la destinée de ce jeune garçon sensible se met en place : il découvre que celui qui menace sa vie prétend être son oncle, Richard et que cet oncle serait mort assassiné et emmuré dans  la Tour par Richard III. La vision d’un enfant blond et pâle le hante alors et ressurgit à chaque fois qu’un drame se noue. Une prophétie va également orienter ses choix : «  Le sauveur tant attendu viendra, puissant, valeureux et pieux. Ô souverain béni, tu es l’élu de Dieu et toute résistance cédera sur ton passage. Tu pourras déployer tes ailes majestueuses car ta gloire  te survivra à jamais. York sera roi. » Persuadé qu’il est ce sauveur, Henri s’exerce mais est obligé de rester dans l’ombre de son frère, Arthur, l’héritier de la couronne et doit faire face au mépris de son père pour qui il n’est qu’une pièce de rechange. Tout change lorsqu’Arthur meurt brutalement.

 

L’histoire d’Henri VIII, le roi aux six femmes, a fait l’objet de nombreux romans, films ou séries dont la dernière en date « Les Tudors » créée par Michael Hirst. Par conséquent, écrire un énième roman sur le sujet est un risque. Harriet Castor ne s’est pourtant pas laissée phagocyter par les écrits précédents et a essayé d’aborder le sujet sous un angle nouveau. Elle dresse en effet un portrait avant tout psychologique d’Henri VIII et essaye d’expliquer la différence entre le jeune Henri, combatif, doué et modèle de vertu en roi dévoré par ses démons. L’auteur tente de voir quelles sont les conséquences de la Guerre des deux roses sur Henri VIII : on comprend alors l’importance de la descendance légitime pour Henri VIII.

 

Très bien documentée sur l’époque, Harriet Castor donne une vision originale de ce roi. Ecrit à la première personne, le lecteur se sent proche de lui et suit son évolution intimement ce qui permet d’envisager la réalité sous son angle et non sous celui laissé par l’histoire. Elle désacralise en quelque sorte ce monstre sacré pour en faire un homme avant tout. On retiendra surtout la relation entre Henri et son père qui apporte une lumière intéressante sur le personnage et accroche le lecteur dès les premières pages. Mêlant réalité historique et fiction, le portrait qui émerge est finalement moins monstrueux et l’on ne peut s’empêcher de ressentir une certaine compassion pour cet homme aux espoirs déçus surtout lors de la dernière scène où la prophétie livre sa dernière partie. Le scan des grands événements marquants de son règne laisse cependant sur le côté la complexité des relations entretenues par le roi avec son entourage et laisse un arrière goût d’inachevé en ce qui concerne son aspect psychologique.

 

Après cet essai plutôt concluant, Harriet Castor, passionnée par les Tudors, travaille sur un nouveau roman sur les filles d’Henry, Mary et Elisabeth, demi-sœurs ennemies, chacune ayant perdu sa mère par la faute d’un père pourtant idolâtré. Un nouveau défi à venir.

 

Julie Lecanu

 

Harriet Castor, VIII, MA éditions, mai 2013, 419 pages, 19,90 euros.

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