La S.-F. en circuit romanesque court - Marc Dugain

Marc Dugain enfonce les portes ouvertes. Sur le numérique, sa toute puissance et ses conséquences. Son roman d'anticipation (nous sommes en fin de notre nouveau siècle) est du genre passéiste.
Une femme est à la tête de "Transparence", une entreprise qui s’applique à collecter des données sur les individus afin de faciliter leurs rencontres amoureuses. Elle a aussi pour but de transférer l’âme humaine dans un autre contenant que le corps. Elle serait impérissable en éliminant son enveloppe.

Nous sommes  loin d'Orwell et même de Black Mirror comme des romanciers lanceurs d'alerte. Tout est attendu, déjà atteint : la fiction pousse juste un peu l'évolution et s'y ressent qu'à l'évidence la S-F n'est pas le domaine de prédilection de l'auteur. Il est plus à l'aise dans la rumeur que la spéculation.

Son héroïne ne tient pas vraiment le fil et reste plus une machine à penser qu'un personnage. Frelatée elle ne matérialise ni ne réinvente pas un genre : elle le dématérialise.

Voulant faire un roman "utile" Dugain se trompe. Bref c'est plus vintage et nostalgique que réellement nouveau. Sorte de sous-Malraux l'auteur se veut de ces penseurs humanistes qui caressent les lecteurs dans le sens des évidences et de la gaudriole "machinique".
Une telle fiction calme les insomnies plus qu'elle ne le entretient. C'est un passage marketing de la nouvelle "création" romanesque. L'anticipation devient une archélogique d'un savoir que Dugain semble découvrir avec bien du retard. Il bougonne, ronronne non sans prétention - c'est le danger des fictions périphériques où tout auteur se croit hâtivement  génial.

L'imaginaire est trop naturalisme dans ses excès pour être impertinent. Se voulant défenseur de l'écologie ce roman institutionnel reste pâlot en mêlant le sentimental et fantastique selon un concept qui se veut expérimental mais n'est que de courtage d'informations guère originales. A l'impossible nul n'est tenu. Même un romancier "miraculeux".

 

Jean-Paul Gavard-Perret

 

Marc Dugain, Transparence, Gallimard, avril, 2019, 224 p.-, 19 €
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