Marc Villemain, Ils marchent le regard fier : Dense et lourd
Dernière ligne lue, ce tout petit
volume vous reste dans les mains comme un de ces galets qu’on ramasse sur les
grèves et qu’on ne se résout pas à jeter. Il est dense comme la pierre, en
effet, et lourd. S’il existait un laboratoire d’analyse essentielle des textes
(LAET), on le lui confierait pour savoir pourquoi il colle aux mains, à la
mémoire. Est-ce la densité du texte ? Peut-être. Le dépouillement des
mots, alors, langage courant, dru, un peu provincial, pas une once de « Madame
de Lafayette » ? Peut-être aussi. Ce n’est pas un texte littéraire,
plutôt un de ces récits d’infortune qu’on écoute un de ces soirs où l’on s’est
réfugié dans un bar après un mauvais dîner et une rencontre ratée, de la bouche
de quelqu’un qui ne se résout pas à aller dormir seul lui non plus. C’est un
morceau d’absurde, obsédant parce qu’il ne se pare pas de romanesque. En
réalité, c’est une tragédie et je me suis mis à penser que ç’aurait bien pu
être un sujet pour Sophocle, parce qu’à la différence du drame, la tragédie
n’est rien d’autre qu’une représentation de l’absurde (à signaler aux
existentialistes qui circulent encore, sur des chaises roulantes).
La courtoisie interdit de raconter l’histoire ; disons alors que c’est une bagarre banale qui tourne mal.
Gerald Messadié
Marc Villemain, Ils marchent le regard fier, Les Éditions du Sonneur, mars 2013, 96 pages, 13 €
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