Sound Prints : Wayne Shorter et après

Par une force d’adhésion à l’esprit du saxophoniste Wayne Shorter (le nom du groupe est un décalage nominal de son classique Footoprints), le quintet de Joe Lovano et Dave Douglas ne se contente pas d’un simple hommage à l’icône. Reprenant les fondamentaux du jazz comme Shorter le fit dès le début au sein des Jazz Messengers de Art Blakey, le groupe repousse  sans les dissoudre les lignes du jazz habituel.

Accompagnés de Lauwrence Fields (piano), Linda May Han Oh (basse) et Joe Baron (drums), Lovano et Douglas donnent de belles contorsions à une musique qui a tendance actuellement à retourner sur des rails bien trop vissés. Après un premier album  "introductif" (Live at Monterey Jazz Festival), celui-ci est à la fois plus convainquant, ambitieux. L’expérimentation  des deux compositeurs est comprise par tous les membres du quintet qui refuse d’enfermer  titres et interprétations dans une seule formule.
Neuf morceaux  originaux sont accompagnés d’une reprise savamment arrangé du Fee Fi Fo Fum de Shorter.

Le Jazz se développe avec subtilité en myriades  de lignes. Elles se décomposent parfois en secondes et tierces avant de retourner au ventre tellurique d’où une telle musique est sortie. L’album est une suite d’effusions intenses, de mouvements charnels, d’états de transe ; tout n’est plus qu’ondes, rythmes, ruissellement.

Le lexique secret du jazz y est revisité et exploré dans le mouvement tout-puissant fomenté par les cinq musiciens d’exception. Surgit un éclatement qui mêle le monde premier de l’Afrique à des foudres expérimentales dont Shorter reste l’âme et le flux.

Jean-Paul Gavard-Perret

Sound Prints – Joe Lovano & Dave Douglas, Scandal, Greenleaf Music, Bertus France, 2018.

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