Jeffrey Eugenides : lits et ratures

Les nouvelles de Jeffrey Eugenides sont dotées presque exclusivement de héros masculins peu reluisants en dépit de leurs fonctions (prof. de fac., musicologue, etc.). Tous déclinent en divers fiascos et déliquescences. C'est aussi déprimant que jubilatoire.
Ces quarantenaires fragiles et friables sont risibles tant le sarcasme est fort . Mais l'empathique tempère le cynisme là où pour toutes actions de grâces ne perdurent que la médiocrité de quotidiens qui nous ramène au peu que nous sommes : comment pourrait-on dès lors les détester ?
D'autant que - comme dans la nouvelle "Musique ancienne" - nous pouvons nous demander s'il sont-ils aussi ratés que cela. Existe dans leur sortie de route une sorte de poésie de l'acceptation au sein d'une écriture en nette évolution. Espacées de trente ans d'écriture, les nouvelles plus récentes sont moins compliquées et possèdent en conséquence plus de force.
La vie humaine est là avec de petites victoires dans l'échec de compulsifs obsessionnels qui finissent par accepter qui ils sont et leur sort. Si bien, que sous le sarcasme une sérénité ou une sagesse apparaît entre mysticisme et carte de crédit. Bref, le ridicule ne tue pas dans ces nouvelles moins destructrices qu'il n'y paraît.
Jean-Paul Gavard-Perret
Jeffrey Eugenides, Des raisons de se plaindre, traduit de l’anglais (États-Unis) par Olivier Deparis, Editions de L'Olivier, 2018, 304 p.-, 22,50 €
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