Camillo Boito : la comtesse de Venise

Boito incarne la lutte entre La Princesse Livia et son amant. Ce sont deux  diaboliques entraînés vers la destruction et l'autodestruction.

Contrairement au film que Visconti en tira, chez le romancier le cynisme est partagé. Il transforme le roman d’amour en celui de trahison et de vengeance entre lieutenant veule et lâche et une comtesse qui a priori ne s'en laissait pas compter.

Extrait du journal intime de la comtesse Livia,  la nouvelle scénarise celle qui règne  sur la cité des Doges et met le monde à sa botte par son pouvoir.

La princesse se laisse néanmoins berner par son bellâtre même si d'emblée elle sait à qui elle a à faire : "Il n’aimait pas les duels, et même, deux petits officiers me racontèrent un soir que, plutôt que de se battre, il avait avalé à maintes reprises les plus atroces insultes". Mais sidérée et fascinée par la perversité comme par la beauté de son militaire elle entre dans un combat mortifère.

D'où un jeu de miroirs entre les deux narcissiques. A l'histoire d'amour traditionnelle se substitue  le combat du mal contre celui du mâle. Ce face à face est infernal égoïste et cruel. 

La  passion la plus sombre se mêle aux élans sensuels là sur la lagune où  les gondoles nocturnes entament une traversée de l'Achéron. L'héroïne déjà allongée e, l'un d'elles comme dans un cercueil. Elle se laisse aller aux voluptueux caprices de son imagination. Et Boito la reprend superbement à son compte.


Jean-Paul Gavard-Perret


Camillo Boito, Senso, édition bilingue traduit de l'italien par Monique Baccelli,éditions Sillage, 2008, 68 p.-, 7,50 €

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