Lamia Ziadé, née à Beyrouth, vit à Paris depuis l'âge de 18 ans. Illustratrice de livres pour enfants, elle a exposé dans de nombreuses galeries. Elle publie des romans évocatoires (Ô nuit, ô mes yeux (2015), et Ma très grande mélancolie arabe (2017). Cette nouvelle mais parfois lie le texte et l'image.

Ce fut le cas avec son premier livre chez P.O.L Bye Bye Baylone qu'elle finalise aujourd'hui en une version longue et un nouveau format - dix ans après sa première mouture. La créatrice séduit plus par ses textes que par ses images. Les deux restent néanmoins toujours proche de l'Histoire qui retrouve la sienne.

L'auteure évoque sa Babylone - à savoir Beyrouth entre 1975 et 1979 lorsqu'elle y vivait petite fille. Beyrouth est en feu et flammes ou dans le noir, en étincelles, en explosions, dans le noir absolu :  "Il y a moi et mon petit frère, il y a des miliciens et des miliciennes... Il y a le magasin de mon grand-père et le foulard en soie de ma grand-mère, la Nivéa de ma nounou", écrit-elle . Mais il y a aussi les cinémas et les hôtels qui brûlent, les bonbons de l'enfance et les armes dont les divers calibres servent un unique but.

Peu à peu le charme chatoyant de la ville tourne à l'enfer. La ville devient un nid sulfureux. L'enfant la traverse entre fascination et horreur là où les salles de spectacle avant d'être bombardées sont traversées d’artistes, de poètes, de cheiks, d’imams, d’hommes de mains, d’émirs, de muezzins, de danseuses et d'enfants insouciants ou effrayés.

La gamine savait déjà regarder et elle n'a rien oublié. Ni le gros et le menu fretins, les aventuriers de toutes espèces et la famille. Le tout dans divers effluves parfois enivrantes (même pour une enfant), parfois insoutenables. La tragédie comme la comédie plus ou moins humaine suit son cours . Avant que la fuite devienne la seule solution possible.

Jean-Paul Gavard-Perret

Lamia Ziadé, Bye Bye Babylone, P.O.L., octobre 2019, 384 p.-, 36,90 €