Leslie Kaplan : train de nuit et nef des fous

À travers une écriture rapide qui éloigne de tout logos et dans l'économie qui lui est chère Leslie Kaplan crée une sorte de fable politique pour nous ramener au réel ou du moins dans ses marges et spéculations.

Fous et bouffons de culture vont y retrouver une visibilité nouvelle au moment où la narratrice et son petit-fils rencontrent un étudiant lors d’un voyage en train qui les ramène à Paris. Très vite et apparemment le trio s'efface. Il est remplacé par l'arrivée fantasmatique d’un prince-clown burlesque. Mais sous cet avatar c'est bien le jeune homme du train qui semble se cacher. 

L’Élysée condamne cet énergumène : il devient un fou à abattre. Mais n'est pas le seul. Une starlette, un ouvrier, une caissière, un infirmier, etc. lui emboitent le pas et se mettent à vaticiner de manière plus ou moins farcesque  contre le capitalisme et pour un autre monde. En face, des mouvements "réactionnaires" s'élèvent. Et les  enfants inscrivent leurs mots pour jouer avec.
Et ce, non dans leurs cahiers mais sur les murs de l'immonde cité.

Parmi eux se retrouve le petit-fils de la narratrice. Il a tout compris  et dégage de l'ombre les discriminés au moment où la radicalité du président se débite en slogans alternatifs à  la réalité.

Toute conclusion ou de morale ne serait ici  que de l'art  ou du cochon. En lieu et place demeure l'amitié entre les trois protagonistes du départ. Ils regardent le monde de concert et en constatent l'inanité. Cela pourrait tenir d'une démonstration un peu pesante mais par le verbe de Kaplan les conventions déraillent et  la folie de l'esprit s'envole.
 

Jean-Paul Gavard-Perret

Leslie Kaplan, Un fou, P.O.L, mars 2022, 96 p.-, 10 €

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