Civil War, tome 1 – Guerre civile

Les super-héros Marvel s'entre-déchirent au sujet de la nouvelle « Loi de recensement des Sur-Hommes » et ses conséquences. Cette dernière impose aux justiciers de révéler leurs identité secrète auprès des autorités afin que celles-ci puissent encadrer et contrôler leurs activités. Les super-héros se divisent alors en deux groupes : ceux qui sont favorables à la loi, et ceux qui la refusent parce qu'elle entrave les libertés individuelles ou menace la sécurité de leurs proches…


D'habitude, dans les events Marvel, la menace est toujours bigger than life, notre planète (sinon notre galaxie ou notre dimension) est sur le point d'être anéantie. Et au moment où tout semble perdu, les héros trouvent une solution.

Mais dans Civil War, la Terre n'est pas menacée : pas d'extra-terrestres envahisseurs, pas de tyran inter-dimensionnel, pas de démons… Non, Civil War c'est presque un micro-conflit. Là où en général les events Marvel occupent de l'espace, sont l'occasion d'affrontements toujours plus impressionnants, ici c'est un petit conflit : la communauté des super-héros se divise, un quasi-schisme. Et à la fin, il ne peut pas y avoir d'intervention salvatrice, où du moins pas celle qu'on entend habituellement.


Le leitmotiv de la saga, c'est « Dans quel camp êtes-vous ? », un questionnement lancé à la face du lecteur, qui va devoir, forcément, faire son choix, et se positionner par rapport à la question qui se pose. À savoir, en fin de compte, si la fin justifie les moyens.


Mark Millar est l'un de ces enfants terribles des scénaristes britanniques qui ont déferlé sur l'industrie des comics dans les années 1990. Un type qui n'hésite pas à régulièrement pilonner le genre super-héros : sa reprise de The Authority, The Ultimates, Old Man Logan, ou Superior, autant d’œuvres à contre-courant, qui réinventent ou redonnent un peu de souffle au genre. Et quand il s'attaque à un autre genre, l'espionnage à la 007 par exemple, cela donne Kingsman – Secret Service. Avec Civil War, Marvel lui confiait, en quelque sorte, les clés de la boutique et évidemment il s'est amusé avec les jouets qu'on lui a laissé, quitte à les secouer un peu fort et les casser.


Il y a bien sûr des points faibles dans cette histoire. On peut par exemple s'étonner de la vitesse à laquelle les héros de déchirent, surtout après avoir sauvé l'univers ensemble (et souvent plusieurs fois !). On peut aussi être surpris de voir des héros faire appel à des super-vilains notoires pour traquer leurs alliés d'hier (le Tireur, tout de même). Surprenant. L'explication est peut-être à chercher dans les coulisses : Millar voulait une histoire en douze épisodes, pour prendre son temps, mais Marvel ne lui en avait accordé que six. Finalement ce n'est pas un mal, Civil War gagne ainsi une réelle intensité, dans le sens où il se passe toujours quelque chose d'important.


La fin est aussi un peu faible, à mon avis : elle donne le sentiment que Millar n'a pas trop su comment terminer son histoire et ranger ses jouets. Comme si il avait fallu ménager un peu tout le monde. La vrai conclusion de cette histoire, il faut la lire dans The Death of The Dream, l'épilogue paru dans la série Captain America (Civil War tome 3, en France).

Et évidemment, comme la plupart des event Marvel, il y a comme des ellipses dans la narration, comblées dans des numéros à part, heureusement réunis en France, dans les tomes 2 à 6.


Civil War est un événement important, un tournant presque, chez Marvel. Pour une fois pas de combat entre bons et vilains, mais des super-héros qui doutent, s'interrogent sur leur rôle, et qui indirectement questionnent les lecteurs. Doit-on tout sacrifier pour la sécurité ? Un questionnement d'actualité (en France, comme ailleurs), et qui continue à titiller les scénaristes US actuels : les New Avengers d'Hickman se posent la même question, dix ans plus tard.

Une lecture plus adulte donc que la moyenne dans le monde du comic book, portée par les magnifiques dessins de Steve McNiven.



Stéphane Le Troëdec




Mark Millar (scénario), Steve McNiven (dessins)

Civil War, tome 1 – Guerre civile

Édité en France par Panini France (7 avril 2010)

Collection Marvel Deluxe

250 pages

29,00 euros

ISBN : 9782809412741

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