Deadpool – Vague de mutilation

Curieux parcours éditorial que celui de Wade Wilson alias Deadpool. Apparu en 1991 dans un épisode de New Mutants, rien ne laissait présager que le volubile mercenaire allait connaître la carrière qu'on lui connaît : conçu comme un pastiche du Deathstroke de DC et un démarquage de Wolverine (pour le pouvoir d'auto-guérison) et de Spider-Man (pour le costume), il est facilement vaincu par les Nouveaux Mutants. Pourtant, Marvel croit suffisamment en son personnage, pour qu'on le retrouve dans X-Force. Puis Marvel va lancer plusieurs mini-séries, où on va notamment commencer à développer réellement le personnage en lui créant des relations, des motivations et un passé.


C'est avec Joe Kelly et la première série régulière que ce processus va battre son plein, et où explose le côté loufoque, voire complètement cinglé du personnage ! Après 69 numéros, et le départ de Joe Kelly, la série s’essouffle puis s'arrête. Marvel greffe Deadpool à un autre personnage, Cable, pour une nouvelle série homonyme, qui s'arrête elle-aussi après le crossover Le Complexe du Messie. Mais faites sortir Deadpool par la porte, il revient par la fenêtre : il va apparaître dans le film X-Men Origins : Wolverine, et Daniel Way utilise sa propre série Wolverine : Origins comme nouvelle rampe de lancement pour le mercenaire. Pas bête. Nous sommes alors pendant Secret Invasion, et Marvel va relancer une série régulière Deadpool. Les épisodes contenus dans cet album correspondent aux numéros 10 à 22 de cette série.


Daniel Way s'inspire énormément du travail de Joe Kelly : Deadpool est donc un personnage complètement cinglé… mais à priori seulement. Car la figure que Way dépeint ici est celle d'un fou génial, d'un maniaque totalement efficace (à sa manière), car il a toujours un coup d'avance sur son adversaire, aussi insensé ou improbable qu'il puisse être (le coup, ou l'adversaire, c'est comme vous voudrez). Mais aussi celle d'un personnage pour qui les concepts de bien et de mal ne s'appliquent pas vraiment, dont le curseur moral varie en permanence, si bien qu'on navigue en permanence dans une ambiance chaotique : Deadpool peut se montrer sympathique avant de flinguer le premier quidam venu pour le plaisir du bon mot ou de la bonne blague.


Ces épisodes présentés ici se déroulent pendant Dark Reign, c'est-à-dire la période où Norman Osborn est le patron du SHIELD, où les Avengers officiels sont des criminels à sa solde, et où la balle est grosso-modo dans le camp des vilains. L'occasion parfaite pour Daniel Way d'envoyer Deadpool côtoyer les super-héros, que ce soit les X-Men ou Spider-Man. Et une manière efficace de connecter cet anti-héros à l'univers Marvel, et de ne pas le laisser en marge.


Je n'ai jamais été fan de ce personnage, et autant dire qu'en attaquant les premières pages, je craignais le pire. Les dessins de Paco Medina puis de Carlo Barberi (qui copie clairement le premier) sont corrects, sans être exceptionnels, et « collent » bien à l'ambiance : leur côté « cartoony » contrebalance la violence de certains passages. Mais surtout Daniel Way fait preuve d'une certaine finesse (toutes les scènes avec Domino, par exemple, qui renvoient à ses débuts dans les années 90). Et force est de constater que Way pose une trame narrative convaincante entre deux délires. Oh, Vague de mutilation n'est pas à mourir de rire, mais on passe un bon moment, le sourire en coin… et l’entonnoir vissé sur la tête !



Stéphane Le Troëdec




Daniel Way (scénario), Paco Medina, Carlo Barberi (Dessins)

Deadpool – Vague de mutilation

Édité en France par Panini France (7 octobre 2015)

Collection Marvel Deluxe

304 pages couleurs, papier glacé, couverture cartonnée

29,00 euros

ISBN : 9782809450579





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