Les maîtres de l'orage de Véronique David-Martin - une trilogie à découvrir

La trilogie les maîtres de l’orage a de multiples visages : roman historique certainement, puisque l’action se déroule en plein cœur de la Seconde Guerre mondiale, roman fantastique puisque le surnaturel, les légendes druidiques ponctuent et rythment le récit, thriller puisque les disparitions d’enfants se multiplient, roman jeunesse puisque les héros sont des adolescents, roman d’initiation enfin. Une saga dense et riche donc sans compter la maîtrise de Véronique David-Martin : d’origine bretonne, l’auteur possède un doctorat en littérature comparée et se passionne pour les contes et légendes dont la puissance universelle lui ont inspiré cette formidable trilogie.

Tome 1 : La marque de l’orage.

Septembre 1939. La Seconde Guerre mondiale commence mais son écho est lointain pour Maewen Goulaouenn qui vient d’arriver avec sa famille sur l’île Verte, une terre réputée pour ses légendes, sa forêt ancestrale et surtout pour la puissance de ses orages. Alors que tous sont dans l’attente d’une attaque allemande, des disparitions mystérieuses se multiplient sur l’île et lorsque des corps affreusement mutilés sont retrouvés, la rumeur d’une bête mystérieuse sème la terreur au sein de la population. Hantée par le Manac’h, un compagnon opalescent qu’elle est la seule à voir, Maewen doit faire face à ce nouvel environnement hostile et ne trouve de réconfort qu’auprès de Gaël. Mais cet univers fragile bascule brutalement lorsque celui-ci est foudroyé. Maewen, désignée comme l’élue, la seule pouvant trouver une antique prophétie, va devoir affronter un mal bien plus profond et dangereux que la menace allemande.


Ce premier tome s’ouvre sur un événement charnière, celui qui bouleverse la vie de Maewen. Un orage d’une rare violence va la séparer du seul ami qu’elle ait jamais eu et va la laisser seule face aux dangers multiples qui menacent l’île. Dès lors Véronique David-Martin organise son récit autour de cet événement : la première partie retrace les quelques mois précédents l’orage. Ecrite à la troisième personne cette partie est particulièrement dense et pose les bases de l’histoire. Maewen découvre les légendes de l’Île grâce à Marie-Louise, la bonne, et se frotte à l’une d’elles lorsqu’un cerf blanc lui apparaît lui murmurant « Toi, toi mon petit roi ». Suivi depuis toujours par le Manac’h dont elle a appris à taire l’existence, Maewen va donc devoir s’initier auprès de Maïa, la sorcière de la forêt pour devenir l’Elue à une des périodes les plus compliquées de la vie : l’adolescence. Le soutien de Gaël lui permet cependant de trouver un équilibre, équilibre rompu par l’orage. S’ouvre alors la seconde partie qui correspond au journal intime de Maewen : l’écriture y est plus légère comme l’on pourrait s’y attendre de la part d’une adolescente de douze ans mais elle est tout aussi intéressante car elle permet de dynamiser le récit.


Le contexte de la seconde Guerre mondiale et plus particulièrement de la drôle de Guerre permet de créer une atmosphère oppressante qui renforce le surnaturel de ce que vit Maewen. L’aspect historique et l’aspect fantastique s’équilibrent ainsi. Ce premier tome s’achève : l’île est rattrapée par la Guerre, Maewen s’interroge sur son statut d’Elue tandis que l’oiseau du diable plane sur l’Ile Verte malgré une première victoire de la jeune fille.


Tome 2 : Le vertige de Rhombus

Mars 1942. Anne et James de Tréharec quittent Paris occupée par les Allemands pour se réfugier sur l’Ile Verte, siège ancestral de leur famille. Leur voyage est d’autant plus angoissant qu’il cache dans leur coffre un passager clandestin. A leur arrivée, ils doivent faire face à l’occupation allemande mais aussi à une vague de disparitions d’enfants qui terrifient et alimentent les superstitions. Pour retrouver les disparus, Anne et son amie Maewen vont affronter le Rhombus, une arme terrifiante mise au point par les nazis.


Eté 2012. Arnaud de Tréharec est obligé de passer ses vacances dans le château familial sur l’Ile Verte. Une perspective qui est loin de l’enchanter d’autant l’Île est frappée par des orages d’une violence sans précédent. Sa rencontre avec un jeune Allemand, Sieg, la découverte du journal intime de Maewen et les lettres d’Anne vont le changer la donne. Sieg et Arnaud vont se retrouver lier au destin de Maewen et d’Anne, chacun des quatre adolescents devant affronter le monstre qui est à l’origine de la disparition des enfants.


« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » : telle pourrait être le préambule de ce deuxième opus. Le fantastique est remplacé par la science ce qui offre une première dualité. D’un côté la science positive de Nikola Tesla et du grand-père d’Anne de Tréharec dont l’objectif est d’améliorer la condition humaine. De l’autre, la science négative et inhumaine des Nazis qui mettent les progrès de la science au service de la destruction. Les liens qu’entretiennent les personnages prennent une place prépondérante dans le récit : il y a bien sûr les liens profonds d’amitié, voir d’amour qui unissent Sieg et Arnaud ainsi que Maewen et Anne. Mais il y a aussi celui qu’entretiennent à des décennies de distance les différents protagonistes grâce au journal intime de Maewen et aux lettres qu’Anne adresse à Claire, sa meilleure amie restée à Paris. Au fur et à mesure que les chapitres se succèdent, ce lien devient de plus en plus fort et tenue pour atteindre son paroxysme dans les dernières pages. La place faite à l’histoire est également plus grande : les affres de l’occupation, la Résistance, les collabo, les lois antisémites et racistes font partie intégrante du récit notamment grâce au personnage de Mattéo.


Le vertige de Rhombus est incontestablement une réussite : les personnages ont mûris, l’alternance entre les deux périodes nous emporte. Le mystère demeure : qu’en est-il de l’Elu et de la légende des deux frères ennemis ? Il faudra pour cela attendre le troisième tome, La Voix de l’Egrégore, à paraître en mars 2015. Le final d’une trilogie que l’on attend avec impatience.

 

Julie Lecanu


Véronique David-Martin, Les maîtres de l’orage, tome 1 : La marque de l’orage, Pascal Galodé éditions, avril 2012, 364 pages, 22,90 euros.


Véronique David-Martin, Les maîtres de l’orage, tome 2 : le vertige du rhombus, Pascal Galodé éditions, mai 2013, 534 pages, 24,90 euros.

 

 

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