1814 la campagne de France, du nouveau sur la chute de l'Empire

Un recueil de qualité


Une commémoration peut amener à des colloques et tout colloque produit des actes : c’est ainsi que les éditions Perrin publient un recueil de contributions sur la campagne de France de 1814, une des plus belles de Napoléon (avec 70 000 hommes, il résiste pendant deux mois face à 330 000) et aussi la plus décisive puisqu’elle décide de la chute finale de son Empire. Pierre Branda, à qui on doit une excellente biographie de Joséphine, et Patrice Gueniffey, auteur d’un Bonaparte remarquable, se sont associés pour diriger ce recueil plutôt réussi.


Rien n’était joué d’avance


C’est éclatant à la lecture de l’ouvrage : si en 1815, Napoléon n’a objectivement aucune chance de l’emporter, en 1814 tout reste possible. Ses victoires de février fragilisent une coalition où les buts de guerre diffèrent entre alliés. Par exemple, l’Autriche a hésité pendant longtemps sur le sort du gendre de François 1er et pourrait s’accommoder de son maintien sur le trône (ou d’une régence en faveur de son fils Napoléon II).  De plus, les alliés ne s’accordent pas sur l’identité de son « remplaçant : les anglais souhaitent le rétablissement des Bourbons, peu populaires en 1814, la Russie avance le nom de Bernadotte… L’erreur de Napoléon est d’avoir dispersé ses forces (c’est bien démontré par Pierre Branda) entre l’Italie, la Belgique, la Savoie, la Catalogne et le nord-est : s’il avait rassemblé plus de troupes, les choses auraient pu être différentes.


L’échec de la mobilisation populaire


Cet ouvrage collectif démontre aussi à quel point les français étaient las de la guerre : la résistance à la conscription augmente, la levée en masse échoue. Quant à la guerre de partisans, on est loin ici d’une mobilisation populaire similaire à celle des russes en 1812 (à nuancer dans le cas des populations frontalières). C’est sur cette lassitude que la Restauration se fonde, ainsi que sur la collaboration de la « technostructure » administrative, osons cette expression anachronique, qui se rallie à Louis XVIII afin de moderniser l’économie française (très bel article de François Démier). Cet excellent ouvrage collectif apporte un éclairage finalement nouveau sur une des périodes les plus troublées de notre histoire.

 

Sylvain Bonnet

Pierre Branda & Patrice Gueniffey (sous la direction de), 1814 la campagne de France, Perrin, mars 2016, 380 pages, 24 €

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