Philosophie de la paresse

Est-ce que la Covid-19 sera le prodrome de la société du XXIe siècle ? Va-t-on enfin comprendre, contraints et forcés, que travailler plus pour gagner plus ne sert à rien ?! Que la vie est ailleurs que dans un bureau, dans une usine ? Que les machines et l’IA doivent nous libérer de nos chaînes et nous offrir enfin la jouissance dont nous avons tant besoin pour ne pas sombrer dans la déprime ou la folie meurtrière ? Hamon sera-t-il notre Lafargue ? Un salaire universel pour maintenir le système capitaliste-libéral en place, mais arrêter la surconsommation et un retour à l’artisanat, à la vie sociale, collaborative, au bien-être des gens, mais le vrai, pas cette bienveillance débilitante brandie en entreprise comme un mantra et qui ne sert qu’à cacher la poussière sous le tapis et à affranchir les incompétents à qui on ne peut plus rien dire car cela les offense…  

Dans la société capitaliste, le travail est la cause de toute dégénérescence intellectuelle, de toute déformation organique. Comparez le pur-sang des écuries Rothschild, servi par une valetaille de bimanes, à la lourde brute des fermes normandes, qui laboure la terre, chariote le fumier, engrange la moisson. 

Paul Lafargue avait su mettre les pieds dans le plat à son époque, et marcher aux côtés de Proudhon et Marx pour libérer les ouvriers de la dictature bourgeoise. S’il s’est trompé sur le dessein communiste qui nous démontra sa pourriture infâme sur le même pied d’égalité que le nazisme, il appelait à un modèle utopique basé sur le plaisir et non la souffrance instauré par les esprits protestants fixés sur la seule rentabilité de leurs entreprises, au mépris des vies de la classe ouvrière… Mais si l’on regarde bien, rien n’a changé ; ce n’est pas l’arrivée de l’iPhone ou de la voiture électrique qui ménage les vies saccagées des ouvriers ou les vagues de suicides des salariés manipulés comme des pions par les patrons du CAC40.  
Lafargue qui mena sa vie personnelle à son terme selon les canons qu’il s’était fixé avec son épouse : ne pas dépasser 70 ans. Ainsi se donnèrent ils la mort en 1911 en laissant une lettre qui est plus parlante que mille discours : 
Sain de corps et d'esprit, je me tue avant que l'impitoyable vieillesse qui m'enlève un à un les plaisirs et les joies de l'existence et qui me dépouille de mes forces physiques et intellectuelles ne paralyse mon énergie, ne brise ma volonté et ne fasse de moi une charge à moi et aux autres.

Dès le XIXe siècle les machines commencèrent à produire mille fois plus qu’un humain, mais personne ne voulait envisager de saisir ce progrès pour émanciper l’ouvrier et créer une société de plaisirs plutôt que de souffrances. Il fallait, au contraire, pousser les machines à fond et les ouvriers aussi pour toujours toujours gagner plus. Mais pour en faire quoi, de tout cet argent ? S’offrir des voyages interstellaires quand la moitié de la population meurt de faim ? Soyons sérieux deux minutes… 

Ce petit livre à la couverture de Vallotton est un précis de bon sens, une ode à la vie, loin des tumultes boursiers et des professions inutiles qui ne servent qu’à occuper des gens à faire des choses qu’ils n’aiment pas, alors que la technologie est là pour nous servir, et non nous aliéner ! 
Achetez ce livre, lisez-le et mettez-le en pratique. Moi, c’est ce que je vais faire, une fois cette chronique publiée ce sera tout pour aujourd’hui, il fait beau, je vais aller en forêt me promener et puis on verra après… 

 

Rodolphe 

 

Paul Lafargue, Le droit à la paresse, 1001 nuits, janvier 2021, 80 p.-, 3 € 

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