Après l'exposition de 2012 consacrée à Degas et le nu, le musée d'Orsay rend hommage au peintre français à travers l'ouvrage méconnu que lui a consacré Paul Valéry, entre autres au nom de leur amitié longue de vingt ans.
Le regard de l’écrivain autour de l'œuvre graphique et la sculpture de Degas a donné naissance, en 1936, à Degas Danse Dessin. Il est dû à Ambroise Vollard. C’est lors d'une rencontre en juin 1929, que Valéry lui fait part de son désir de consacrer un livre à Degas. Quelques pages paraissent en janvier 1934 dans La Nouvelle Revue française et en février 1937 Valéry publie ce livre grand format tiré sur vélin de Rives dont Gallimard - qui éditera l’année suivante une édition courante - republie en fac-simile.

Valéry minimise la portée de son travail : "Comme il arrive qu'un lecteur à demi distrait crayonne aux marges d'un ouvrage et produise, au gré de l'absence de la pointe, de petits êtres ou de vagues ramures, en regard des masses lisibles, ainsi ferai-je, selon le caprice de l'esprit, aux environs de ces quelques études d'Edgar Degas."
Néanmoins ce soliloque en hommage à Degas offre une vision aussi factuelle que générale de l’homme et de l’œuvre. Il montre la profondeur cachée d’un génie qu’on prend parfois pour sage et léger.

La danse dans la mobilité de ses formes permet à l’artiste un acte pur de métamorphoses ? Valéry en revient l’entomologiste, il comprend combien le vivant est saisi en lignes serpentines qui rappellent la grâce des danseuses et leur donnent une seconde existence. Toute l’œuvre du peintre reste en étroite corrélation avec celle du poète. Il accompagne l’œuvre entre témoignage et "fiction" dans un rapprochement habile du peintre avec Mallarmé ("maître" de Valéry).
Chez les deux prédominent le transport du visible du métaphorique au métamorphique.

Jean-Paul Gavard-Perret

Paul Valéry, Degas Danse Dessin, Fac-similé de l'éd. d'Ambroise Vollard (1936), coll. Livres d’art, Gallimard, Paris, 2017, 250 €