"Artemisia (1593-1654) - Pouvoir, gloire et passions d’une femme peintre" : peindre, d'abord !

Être une femme dans la Rome baroque, peintre qui plus est, n’a sans doute pas été de tout repos... Est-ce parce qu’elle était femme que ses peintures furent superbement ignorées pendant les 18 et 19ème siècles ? Il faudra attendre 1916 pour que Roberto Longhi remette à l’honneur l’art d’Artemisia Gentileschi de Lomis, lui si recherché du vivant de son créateur...
Alors le temps fit son office et les toiles furent oubliées dans les palais des puissants de ce monde. Il faudra près de quatre-vingt années pour qu’un semblant d’ordre soit (r)établi et permette une première exposition. Ce fut celle de 1991 à la Casa Buonarroti, de Florence. Et aussitôt le public succomba. Fasciné. On voit en Artemisia le porte-drapeau de l’insoumission féminine. Elle serait l’incarnation du mouvement de libération des femmes. Ah, ces critiques, ils ont un don pour le collage d’étiquette... Car, une fois encore, on oublie un peu vite l’artiste pour se pencher sur son sexe. Combien il serait aisé de se moquer éperdument du désordre qu’elle s’amusait à répandre dans les codes sociaux de l’époque. Car l’essentiel est ailleurs. La vérité est dans sa peinture. Artemisia est peintre. D’abord.


Certes elle aura été calomniée, bafouée, rejetée ; et elle aura survécu et vaincu tous ses adversaires. Retour triomphant à Rome, commandes officielles. Sacre.
C’est donc en 1610 qu’Artemisia fit ses débuts officiels avec son magistral Suzanne et les vieillards. Un tableau d’une qualité exceptionnelle. D’une force narrative inattendue. Elle n’avait que dix-sept ans... Sa réputation est faite. Car elle a démontré qu’elle savait saisir le corps humain en mouvement. Ce qui, traditionnellement, était tenu pour le plus grand défi lancé aux peintres. La voila donc dans la place. C’est là que les ennuis vont commencer...
Mais rien n’arrêtera son génie qui réside dans son rendu fidèle des moindres détails. Une capacité à composer ses tableaux de façon à mettre en valeur l’impact émotionnel. Un format vertical pour jouer de la perspective. Et le résultat était littéralement stupéfiant !


Accompagnant l’exposition qui se tient à Paris, au musée Maillol jusqu’au 15 juillet 2012, ce très bel ouvrage est bien plus qu’un simple catalogue. Tout d’abord par la qualité des textes de présentation qui l’ouvre. Ensuite par la richesse de ses illustrations et des notes qui accompagnent chaque tableau. Une belle réussite qui place Artemisia à sa juste place dans l’histoire de l’art. Juste derrière le Caravage...


Annabelle Hautecontre


Collectif, Artemisia (1593-1654) - Pouvoir, gloire et passions d’une femme peintre, 245 x 285, couverture souple à larges rabats, 120 illustrations couleurs, Musée Maillol-Fondation Dina Vierny/Gallimard, mars 2012, 256 p. - 39,00 €    

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