La dernière croisade, la fin du rêve de Saint Louis

 

Un spécialiste de l’histoire militaire médiévale


Ancien élève de Philippe Contamine, Xavier Hélary est maître de conférences à l'université Paris-Sorbonne. Ses travaux portent notamment sur le règne de Philippe III le Hardi (et le rôle joué auprès de lui par son ministre Pierre de La Broce) ainsi que sur la guerre et la société militaire en France de Saint Louis à Philippe le Bel. Il a également participé, aux côtés de Philippe Contamine, à un ouvrage sur Jeanne d’Arc dans la collection bouquins. Après avoir publié une synthèse  sur la bataille de Courtrai (1302) aux éditions Tallandier en 2012, Xavier Hélary se propose de revenir ici sur la croisade menée par Saint Louis en 1270, la dernière en fait. La plus folle aussi, on va très vite le voir.


Pourquoi Tunis ?


Un des mérites (nombreux) de cet ouvrage est de s’interroger sur la singulière destination de cette ultime entreprise des croisés : Tunis et la Tunisie paraissent pour le moins excentrée par rapport à la Terre Sainte où survivent tant bien que mal les derniers établissements fondés par les chrétiens occidentaux au XIième siècle. Il semblerait que Louis IX ait voulu sécuriser la route menant au proche orient. Il a cru aussi à une possible conversion de l’émir de Tunis, souverain musulman plutôt pacifique et ouvert au commerce avec les européens. Son entreprise est soutenue par son frère Charles d’Anjou, qui vient de s’emparer du royaume de Naples en éliminant les derniers descendants mâles de l’empereur Frédéric II de Hohenstaufen. Ce dernier voit dans la croisade de son frère une occasion de renforcer son influence en Méditerranée. Rien ne se passera cependant comme prévu pour le futur Saint Louis. Si le débarquement de son armée est réussi, les musulmans résistent et l’émir ne montre aucune envie de se convertir à la vraie foi… Le roi de France tombe malade et meurt en août 1270, laissant à son frère la direction des opérations : Charles battra les tunisiens dans des batailles loin d’être décisives et obtiendra le rétablissement du tribut autrefois payé à Frédéric II. Et c’est ainsi que l’épopée des croisades se termine…


Saint Louis, un stratège médiocre


Le livre de Xavier Hélary est clair sur un point essentiel : souverain attaché à ses prérogatives et administrateur compétent, Saint Louis démontre par contre, comme lors de sa croisade en Égypte, qu’il est un médiocre chef de guerre. Une fois débarqué près de Tunis et campant sur le site de Carthage, il se réfugie dans l’attentisme et préfère attendre l’arrivée de l’armée de son frère avant de passer à l’attaque, comme vingt ans auparavant à Damiette en Égypte. D’un point de vue stratégique, la huitième croisade s’avère une erreur car, même s’il avait réussi à prendre Tunis en l’absence de conversion ( !) de l’émir (comment d’ailleurs a-t-il pu croire à cette fadaise ?), qu’en aurait-il tiré pour aller en Terre Sainte ? De plus, l’occupation de la ville et des environs auraient immobilisé des troupes qui lui auraient manqué par la suite. Pour autant, l’épopée de Saint Louis ne serait pas la même sans cette ultime croisade. À ce titre, Tunis est un peu son Waterloo… un très bon ouvrage qui ravira les amateurs.

 

Sylvain Bonnet


Xavier Hélary, la dernière croisade, Perrin, mai 2016, 312 pages, 22 €

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