France 1940, les raisons de l'effondrement

Un spécialiste américain de la France

 

Philip Nord fait partie de cette espèce rare des historiens américains de la France, à laquelle appartiennent par exemple Steven Kaplan et Robert Paxton. Spécialiste de la France des XIXe et XXe siècles, Philip Nord s’est surtout attaché à l’histoire socio-culturelle de l’Hexagone. Il est ainsi l’auteur de plusieurs livres dont Les Impressionnistes et la Politique : art et démocratie au XIXe siècle, Le moment républicain. Combats pour la démocratie dans la France du XIXe siècle, (Armand Colin, 2013) et Le New Deal français (Perrin, 2016). Avec ce dernier ouvrage, il s’est attaqué à l’histoire politique, proposant une analyse iconoclaste mais déjà bien ancienne qui démontrait les continuités entre IIIe République, Régime de Vichy et Résistance via l’analyse de la culture des élites : un chemin déjà défriché avec Jean-Louis Loubet del Bayle avec Les non-conformistes des années 30, paru dans les années 70.

 

Comment expliquer la défaite de 1940 ?

 

Chaque génération d’historiens se penche sur la campagne de mai-juin 1940 en essayant de résoudre la même énigme : comment la France, première puissance militaire en 1918, s’est-elle effondrée aussi rapidement ? Avec beaucoup de talent, Philip Nord fait un sort à certaines légendes. Par exemple, la diplomatie française avait selon lui constamment cherché des alliés devant la montée d’un péril hitlérien qu’elle avait bien perçue : le problème fut que le seul allié d’envergure, la Grande-Bretagne, partageant avec la France les valeurs démocratiques, resta longtemps favorable à l’apaisement face au dictateur nazi, du moins jusqu’à l’occupation de Prague en mars 1939. Nord réhabilite aussi l’effort économique et industriel consenti par la France pour faire face à la guerre et rattraper l’Allemagne. Il réhabilite même la stratégie française d’ensemble, qui consistait à être d’abord défensive pour permettre d’acquérir la supériorité matérielle : ne fut-elle reprise ensuite par l’Amérique ?

 

Un problème militaire et politique

 

Pour lui, le problème réside à la fois dans une inadéquation totale de la stratégie militaire française, en retard d’une guerre, et dans la trahison d’une partie des élites qui n’avaient jamais accepté la République et qui saisissent l’occasion de la débâcle afin de régler leurs comptes (tout en dénonçant la décadence morale du régime, thèse reprise ensuite par nombre d’historiens et d’analystes). C’est juste, si on reprend les travaux des historiens depuis quarante ans que Philip Nord expose ici avec clarté et rigueur (malgré des erreurs page 104, la Norvège est conquise par les nazis en avril 1940 et l’opération de Narvik a lieu en mai). voici une excellente synthèse qu’on ne peut que recommander.

 

Sylvain Bonnet

 

Philip Nord, France 1940, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Jacques Bersani, Perrin, mars 2017, 240 pages, 19,90 €

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