Courrier de Tartarie (Peter Fleming)

"La plupart des voyages débutent de façon moins tranchée qu'ils ne s'achèvent...". Ainsi Peter Fleming commence-t-il le récit de son exploration de l'Asie en 1935 sur six mille kilomètres, de Pékin à Karachi. 

Ce livre a une portée historique certaine : l'auteur traverse des contrées sauvages où les bouleversements politiques agitent les peuples en prélude à la Seconde Guerre Mondiale. Mais là n'est pas son intérêt, ni d'ailleurs l'objectif premier de l'auteur. 

Qui est Peter Fleming ? Pur produit de la High Society de la couronne britannique, ancien d'Eton, fils d'avocat, commando, agent de renseignement pour le MI 6, journaliste, aventurier et frère de Ian Fleming, lui-même écrivain et créateur de... James Bond. A l'occasion, Peter prend la plume pour narrer ses voyages. Soyez sûr que rien d'ennuyeux ne sort de la plume d'un tel numéro. Il compte deux succès à son palmarès : Un aventurier au Brésil (1933) et Courrier de Tartarie (1936). 

Evidemment en 1936, une telle expédition ne pouvait pas être totalement innocente. Voyager à cette époque entre le Japon impérialiste, la Chine communiste et la Russie des Soviets n'est pas à assimiler à du simple tourisme. Officiellement — en tout cas c'est ce que Fleming déclare en introduction —, deux motivations sont à retenir : traverser le mystèrieux Sinkiang troublé par les conflits et coupé du reste du monde civilisé d'une part, le plaisir d'autre part. Son goût pour les nuits à la dur (pas si avéré que cela), les rencontres inattendues, la chasse, les dangers, la montagne et les déserts a pu trouver ici de quoi se satisfaire.  

Cependant ce dernier motif est-il plus profondément lié à la présence à ses côtés d'Ella Maillart ? Comme elle-même le laisse entendre dans une interview datée de 1989 et publiée par les Editions Phébus, sous leur étroite tente commune, leurs relations auraient été plus qu'amicales. Ella, rencontrée par accident dans une gare chinoise, la belle aventurière, femme libérée. déjà auteur à succès. "Intrépide", "grande, plutôt belle", "de caractère", le jeune fiancé de seulement 28 ans se trouve décidément bien accompagné. Même si l'un et l'autre semble tout d'abord plutôt porté sur l'aventure individuelle, la possibilité de prendre un guide commun pour découvrir le Sinkiang va les unir. 

Embarquez à votre tour dans le train au départ de Pékin ou bien lisez ce livre et, comme les voyageurs "so british", à ceux qui restent à quai et vous disent "au revoir, au revoir et bonne chance", répondez par : "Je vous verrai probablement en Chine ? "


Peter Fleming, Courrier de Tartarie, traduit de l’anglais par S. et P. Bourgeois, Phébus, juin 2001, 432 pages


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